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Interview réalisée en octobre 2008 - Crédit photos : D.Didier / N. Rakotopare (Taste of indie) / Rod | Le-HibOO.com

La suite est arrivée plutôt rapidement, vous avez écrit pendant la tournée ?

— Thomas : Ca va trop vite en tournée pour pouvoir écrire. Par contre, on est sans arrêt en train de bosser sur de nouveaux morceaux et puis les morceaux de « Off with your heads ! » ayant été écrits pour la plupart assez longtemps avant la sortie du disque, on avait pas mal de morceaux déjà commencés au moment de sa sortie. On a fini tout ca pendant les 2 ans et demi qui ont suivi.

Vous aviez une idée de base pour ce nouvel album ?

— Thomas : Pas du tout. On se laisse toujours porter par les morceaux qui nous viennent. Rien n’est planifié. Tout est à l’instinct, au ressenti au début. Par contre, les morceaux ont été plus fignolés par la suite C’est une vraie prise de tête après l’enregistrement pour savoir quels morceaux on garde et l’ordre dans lequel les mettre pour que l’ensemble sonne d’une façon cohérente.

Comment se sont répartis les rôles pour cet album ? Avez-vous fait confiance à ce que Brian Eno appelait les accidents. « Waiting for you » n’est-il pas un accident heureux ?

— Thomas : Comme je le disais on se laisse porter par nos idées et donc l’album n’est fait que d’accidents dans ce sens. « Waiting for you » est tout simplement venu un soir de solitude et suit donc ce schéma.

Premier constat, ce sont les ambiances tranchées tout au long du disque ?

— Thomas : Accidents, accidents. On peut écouter des choses très différentes sur une semaine ou un mois et donc les morceaux s’en ressente. On ne s’est jamais dit « on va faire une musique dans tel style », ca non. Ca nous ennuierait. Donc quand on se tape des périodes Townes Van Zandt, Sonic Youth, Deerhoof, John Zorn ou Gablé, les chansons s’en ressentent. D’où ces différentes ambiances.

« Pow ! » et « Dig a hole » sont d’ailleurs aux antipodes de ce que l’on pouvait bien lire sur vous, ces titres sont même effrayants.

— Thomas : Oui et bien ca n’est pas toujours la fête chez nous ! Une bonne chanson sombre est le meilleur remède contre la déprime longue durée. Et ca fait vraiment du bien à écrire. Tout le monde a ses morceaux de déprime qui font énormément mal sur le moment mais qui font prendre conscience que l’on n’est pas tout seul. Pour ma part, mes préférés sont « Famous Blue Raincoat » de L. COHEN et « Riding » de PALACE.

— Vincent : Oui et « Dig a hole » est certes une ambiance dépressive, mais ça parle d’un personnage qui décide après une longue série noire de rebondir et de changer son comportement pour le bien de ses proches. Donc y’a quand même de l’espoir dans ces paroles, et le morceau suivant (« Baby Honey ») est d’ailleurs le titre le plus gai de l’album, qui parle d’une rencontre amoureuse lors d’une belle journée ensoleillée…

Le disque semble plus pop au premier abord, mais plus consistant sur la longueur. Vous avez muri (rires) ?

— Thomas : Le disque est tout simplement moins instinctif dans l’écriture que « Off with your Heads ! » et pour ma part, je suis passé par des phases qui m’ont donné à réfléchir sur mon futur.

— Vincent : Je ne sais pas si on a mûri mais en tout cas cet album a eu plus le temps de mijoter que le premier, ça c’est évident. C’est en gros 3 mois de travail en groupe pour le premier contre un peu plus de 2 ans pour celui-là.

D’ailleurs au final s’il fallait garder quelque chose de négatif sur le premier opus c’est ce sentiment de « coolitude » qui pouvait tout autant vous desservir que le contraire. Vous n’avez pas eu peur d’en pâtir d’une étiquette lo fi qui aura eu souvent la peau de ses papes ?

— Thomas : Pas du tout. Le premier disque s’est fait de manière rapide, en 2 jours d’enregistrement. Donc forcément, ca sonne plus Lo-Fi. Mais bon, on est aussi des vieux fans de Sebadoh ou Calvin Johnson alors ça nous convient. Après, c’est bien que l’on ne nous parle plus de Lo-Fi concernant « Dear Mr Painkillers ». Ca veut dire qu’on évolue et qu’on n’a pas fait un « Off with your Heads ! » bis.

S’il fallait définir ce nouveau disque pour une publicité rapide et soignée, Cornflakes Heroes c’est la reformation du Velvet Underground avec Malkmus à la place de Lou Reed et les Grandaddy comme sparing partner ?

— Thomas : Leonard Cohen avec les Musclés coachés par les Shaggs mais avec Max Roach à la batterie.

— Vincent : Oh non Bernard Minet il est bon à la batterie !!?...

Quelles sont les choses, qu’elles soient écrites ou musicales, qui ont pu vous influencer pour l’écriture de ce nouvel album ?

— Thomas : Au niveau bouquin, j’ai lu plusieurs bouquins de Fante ce qui m’a peut-être inspiré inconsciemment. J’ai lu également beaucoup de BDs.

L’une des surprises c’est le titre Rotten Throat / Sweating Pores, surtout placé en milieu de disque lui qui sonne comme un morceau de fin digne du « Washing machine » de Sonic Youth.

— Thomas : Sa place est idéale au milieu. Personnellement, c’est un de mes morceaux préférés du disque et je trouve que les deux ambiances du morceau représentent très bien l’esprit du disque et sonnent comme une bonne transition pour les morceaux qui suivent.

Le son de guitare d’ailleurs à la fin de ce morceau est très emblématique d’une certaine période New Yorkaise. Pour la production vous avez laissé carte blanche ou vous êtes pas mal intervenus dans le processus ?

— Thomas : Carte blanche. Nous ne sommes intervenus que lorsque ça ne nous plaisait vraiment pas, ce qui n’est presque pas arrivé. Bastien, l’ingé son du Minipop Studio, est quelqu’un avec qui on partage beaucoup de choses en matière de Rock. De toute façon, en règle générale, on préfère laisser une place importante aux personnes avec lesquelles on travaille. Ça a beaucoup plus d’intérêt et ça nous enrichit.

J’avoue avoir un gros faible pour « Good Morning Naked City » dont la dynamique n’est pas sans me rappeler les méthodes utilisées par David Gedge et son Wedding Present. Comment est né ce titre ?

— Thomas : Debout dans mon salon. Non, j’ai trouvé une mélodie assez tranquille à la guitare et ca m’a amusé de passer à un rythme tout d’un coup un peu plus sec comme pouvait le faire le Velvet. C’est sûr que c’est une sorte d’hommage à un grand groupe. Les paroles ont suivi dans cette idée.

Sans risquer de m’en prendre une, il y a parfois des accointances avec ce que peut faire Dionysos, sauf que chez eux à la première écoute on sait de suite qu’ils sont français.

— Thomas : Je dois avouer que je ne connais pas très bien Dionysos hormis les morceaux les plus connus. Mais le peu que j’ai écouté ne m’a pas donné envie d’aller plus loin pour le moment malgré l’intérêt que peuvent montrer certains amis pour eux.

Avez-vous été influencés par cette nouvelle scène très redevable du travail d’Animal Collective ?

— Thomas : Je ne pense pas non. Notre son est très basique par rapport à des groupes comme « Animal Collective » ou « Why ? » qui utilisent beaucoup plus de samples, d’effets,…. Mais nous avons acheté un sampler il y a peu de temps donc on pourrait incorporer plus de variété dans notre son sur les prochains disques. Va savoir ???

— Vincent : On a quand même déjà mis pas mal de samples sur celui-là, et cela combiné à l’ajout d’instruments comme la trompette, le moog, le violoncelle ou le glockenspiel, ça fait un disque assez riche déjà je trouve.

La vraie continuité elle est au niveau de la pochette. Vous avez une idée de base pour vos pochettes ou vous laissez libre choix au concepteur ?

— Thomas : Libre choix comme on a pu le dire auparavant. On bosse actuellement sur un clip pour Sex on Channel #4 et le réalisateur nous a demandé si on avait des idées. Notre réponse a été « pas trop mais on te fait confiance », et je suis sûr que l’on ne va pas être déçu. On a fait notre musique. Si on se sent capable ou si on a une idée précise pour une pochette ou un clip, et bien on le fait nous même. Quel est l’intérêt pour un mec de bosser avec des gens qui lui imposent de faire telle chose de telle façon. L’échange est beaucoup plus intéressant. En tout cas, on n’a jamais regretté cette façon de faire jusqu’à maintenant et encore moins après le travail qu’a fait Gablé sur cette pochette que l’on trouve tout simplement magnifique.

Qui est le bambin que l’on entend à l’introduction de « Sex on Channel #4 » ?

— Thomas : C’est ma nièce Karen qui vit au Japon.

Le mot de la fin est pour vous ?

— David : merci ADA !