L’aventure Negativland a débuté en Californie en 1979. Facétieux en diable sur la forme, les membres de Negativland n’ont jamais cessé au gré de leurs nombreux albums, de soulever des questions de fond avecun ceryain sens visionnaire, en développant notamment leur concept du ‘Fair Use’ par lequel ils affirment que toute œuvre musicales, radiophoniques ou multimédia doit pouvoir être samplée librement à partir du moment où ledit sample est retravaillé et intégré dans une œuvre nouvelle dont il ne constitue qu’une fraction « raisonnable »… Ils ont d’ailleurs été à l’initiative, avec KLF et Bob Ostertag (dont je vous parlerai du Copyright Violation Squad, entité de propagande « pro-sampling » et boite postale où l’on pouvait envoyer une cassette vierge et un billet de 1$ (pour le courrier de retour) de façon à recevoir des copies des enregistrements de ces agitateurs qui ne pouvaient pas être exploités pour des raisons d’infraction à la loi de la propriété intellectuelle. Ils firent notamment largement parler d’eux avec la publication du 45 tours limité à 500 copies ’The Letter U and The Numeral 2’ dans lequel outre un long sample du tube planétaire de U2 ’I Still Haven’t Found What I’m Looking For’ ils avait également inclus dans leur collage sonore un enregistrement du présentateur radio américain superstar (et visionnaire comme vous allez le voir) Casey Kasem datant des tout débuts de U2 dans lequel il affirmait en substance « ce sont des bouseux irlandais, ils ont un nom à la con, U2, mais pas la peine d’essayer de retenir quoi que ce soit car de toute façon ils sont tellement nuls que vous n’êtes pas près d’en entendre reparler ! »... Forcément, ça fache ! Le système judiciaire américain étant ce qu’il est, Negativland se trouva aussitôt traduit en justice par une armée d’avocats opérant qui pour U2 et qui pour Kasem… Jusqu’au boutistes, ils documentèrent d’ailleurs largement leurs déboires juridico-musicaux au travers d’un magazine puis d’un livre (’Fair Use’) où figurent de très nombreux soutiens de personnalités telles que Brian Eno ou Timothy Leary pour n’en citer que deux… La procédure les ruina sans compter l’amende à laquelle ils furent condamnés et qu’ils ne pouvaient d’ailleurs, de toute façon, pas honorer.
Tout ce long préambule résume hélas bien trop rapidement cette histoire (j’invite les plus curieux à se documenter par eux mêmes…) mais permet de placer ce ’Dispepsi’ dans le contexte qui convient à bien en comprendre les tenants et aboutissants !
Ruinés pour ruinés, Don Joyce et ses amis de Negativland décidèrent de travailler à un album concept autour de la guerre marketing mondiale que se livrent Coca-Cola et Pepsi –Cola. Le concept est poussé très loin puisque la typographie du titre de l’album est volontairement illisible de façon claire et certaine. Dans le livret du CD, les Negativland expliquent que le nom de l’album n’a pas pu être clairement mentionné sur l’album pour des raisons évidentes de copyright de marques existantes mais qu’un appel à un serveur téléphonique mentionné dans ce même livret permettra d’en connaître l’exacte prononciation… Musicalement, le propos est comme à l’habitude un collage sonore plutôt hilarant mais également très réfléchi qui aggrave définitivement le cas des turbulents californiens… En effet, sont samplés sur l’album un large éventail de publicités des deux marques en présence et par là même certains des acteurs et interprètes y figurant dont Tina Turner ou Michael Jackson… Ou comment se mettre à dos les deux plus grosses marques mondiale et la crème commerciale des entertainers mondiaux... Comme quoi, l’affaire U2 n’était qu’une mise en jambe !
Pour en savoir plus sur le Copyright Violation Squad : www.detritus.net