> Critiques > Labellisés



Après un EP remarqué au printemps dernier, Pollyanna, entre temps signée chez Vicious Circle - label impeccable qui d’ailleurs fête ses 20 ans cette année - nous propose avec The Mainland une belle ouverture ; les portes un brin étriquées d’un style indie-pop-folk volent en éclat et laissent apparaître une multitude d’angles de vue.

Pour être honnête, cet album a mis du temps à grandir en moi. J’y ai d’abord retrouvé les morceaux imparables du Spring EP auxquels je m’étais habitué, mêlé à d’autres aux accents différents, comme si Isabelle Casier avait voulu mettre en exergue ses influences actuelles sans vraiment vouloir choisir son camp - comme s’il fallait le faire, d’ailleurs.

Au fil des écoutes, j’ai compris, du moins je pense. Pollyanna s’est nourrie de ses expériences, de ses rencontres lors de tournées aux États-Unis, en Angleterre, en Allemagne... ces rencontres souvent fortuites ont conduit à la couleur chatoyante de l’album, grâce au groupe qui s’est peu à peu constitué autour d’Isabelle. Contrebasse, violoncelle, alto, violon, batterie ouvrent la palette sonore vers la folk classieuse (My favourite song, la bien nommée), la country (Broadcast in heaven), une sorte de blues joyeux (I wish I worked in a factory), le rock (le suprenant Old rockers), avec un plaisir évident à jouer ensemble. Cette énumération de style est bien sûr réductrice, quand on écoute des titres comme Real life aux arrangements axés sur les cordes, en tout point réussi. Old rockers n’est pas non plus aussi monolithique qu’on pourrait le penser, avec une fin toute en ambiance. You’re a tiger (déjà présent en version « kitchen » sur le ep) s’ornemente quant à lui de cordes et de chœurs joyeux qui enchantent la fin du titre. On pense à Laura Veirs dans l’approche à base folk élargie à d’autres styles venant enrichir le contexte.

La sonorité générale est plutôt acoustique - sauf exception - et feutrée, on a aussi une impression de proximité, comme si le groupe jouait dans notre salon, si Isabelle nous chantait au creux de l’oreille ses mélodies douce-amères. Car tous ces morceaux aux mélodies ouvragées et accrocheuses ont ce point commun de mettre en exergue la belle voix d’Isabelle qui sait se faire caressante, contemplative, compassionnelle...

Et sans forcément s’en rendre compte, on passe (et on rêve de rester) à Brighton, on fait un détour à Bruxelles où l’on prend d’ailleurs Valérie Leclerq (aka Half Asleep) en autostop avec son piano, on change de point de vue en parcourant le monde.

Pollyanna a fait un pari audacieux avec ce disque, celui de nous faire prendre la route dans son sillage (une ambiance portuaire sur la pochette, quoi de mieux ?) pour aller découvrir son pays-monde imaginaire. « Hit the road before they catch us ».

Tentons l’aventure.