Je ne suis pas un initié, loin de là... Je ne prétends pas à appartenir à une frange franc-maçonnique de la pensée mélomane. Je ne suis pas un fondamentaliste musical, un traditionaliste sectaire aux querelles de clocher affirmées. Je ne suis pas un témoin de Jehovah de la note parfaite qui s’inscrit contre le blasphème face aux préceptes de la chose Pop... Le mot "Hype" n’a pas de sens pour moi et je ne suis pas de ces barbus folkeux ni de ces types déguisés en pantalons slim comme des uniformes que l’on porte. Je ne pense pas forcément que le vinyle c’est quand même mieux que le CD, un 33 tours rentre mal dans un autoradio.... Le Mp3 ne me fait pas rugir de douleur. Je ne suis pas de ceux qui prônent la culture, sa culture, sa propre culture comme une posture sociale, comme une source de pouvoir face à ceux qui ne savent pas, comme une source d’exclusion. Je n’aime pas ces postures Indie de cercle fermé, de microcosme parfois suffisant. Je ne prétends pas à être de ceux qui considèrent ce qui est de bon goût ou non... Ce qui m’intéresse, c’est la Musique qu’elle ait des volontés mercantiles ou non... Comme beaucoup d’entre vous, j’ai ces petits groupes confidentiels que je chéris mais que je ne conserve pas comme des secrets face à la multitude médiocre.... Quand quelque chose est beau, il faut le partager... Quid D’Anywhen, d’Imagho, des Blue Nile, de The Apartments ?
Pourtant, quand je lance "Ghost To Be", le premier titre ouvrant le nouveau projet d’Overseas, la tentation me gagne de tomber dans ces travers que je viens de critiquer. Qui parmi les moins de 20 ans se souvient de Bedhead, de The New Year, de Pedro The Lion ? Ces groupes marqués 90’s dans l’inconscient collectif Indie... Et pourtant, parmi nous, ceux qui les connaissent reviennent souvent à cette Pop noisy et mélancolique. Overseas, c’est un peu "Le super groupe pour initiés"... Excusez du peu, David Bazan de feu et regretté Pedro The Lion, Will Johnson et les frères Kadane de Bedhead/The New Year... Vous prenez un peu de l’univers de chacun des quatre, vous mélangez et vous obtenez dix chansons sans fioritures ni scories, sans effet inutile, dix compositions souvent bouleversantes....
D’ailleurs, en parlant d’émotion, il serait temps de réévaluer la carrière solo de David Bazan à bien des égards exemplaire et dont on sent tout l’apport dans ce nouveau projet. Il parvient à additionner une certaine combativité lucide à l’univers habituellement plombé des frères Kadane comme sur le clair-obscur "Redback Strike" ou une même envie de rejet de la torpeur dans "Old Love"
Dans tous les albums de The New Year, il y a toujours ces constats frontaux d’echec d’élévation de soi comme le très beau "MMV" sur le dernier album du groupe en 2008,comme la volonté d’un effacement de soi, thématique qui retrouve une résonance dans "Help".
"i don’t need your simpathy no memory..."
"Lights Are Gonna Fall" surprend par ses aspects presque positifs et ce piano doux quand "Here (Wish You Were)" s’égare dans l’annonce d’une tempête prête à gronder. Avec "The Sound Of Giving Way", vous retrouverez la juvénilité puérile de votre adolescence avec ce titre idéal pour de l’air guitar classieux... Vous martèlerez sur vos fûts imaginaires en vous disant quel p....n de batteur subtile il est le père Kadane... Un des grands titres de cet album, tubesque dans un monde idéal où les Christophe Mae et autres affreux seraient d’obscurs artistes underground et miséreux.
"Down Below" convoque les cadavres embaumés de Bedhead avec ce son rêche et métallique.
"I’ll show my body to millions I’ll face my feelings alone"
"Come With The Frame" ou comment allier l’impudeur avec l’urgence de se révéler. "All Your Own" conclue en élégie ce premier album d’Overseas. Nous ne savons pas s’il y aura un nouvel album de The New Year, si les frères Kadane referont leur apparition avec leur Slowcore qui n’a rien à envier à Low, nous ne savons pas non plus si nous aurons des nouvelles de David Bazan ou de Will Johnson... Ce que nous savons par contre, ce dont nous sommes sûrs, c’est que nous ne le garderons pas pour nous ce disque d’Overseas, que nous le partagerons car la Musique finalement, ce n’est rien de plus que les relations humaines décodées et mises en notes harmonieuses.