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Rodolphe. J’avais fini par perdre votre trace. Vous m’aviez échappé. De disques en projets, de festivals en lectures, je n’arrivais plus à vous suivre, vous mon maitre étalon, leader de ce que je considère encore avec rage et amertume comme le meilleur groupe de rock français, groupe le plus ignoré, soit de façon clinique par ignorance, ou plus simplement par une absence de relais de ceux qui savent, mais qui aiment souvent dire le contraire. Le maitre étalon que vous êtes pour moi vient de sortir ce qui me semble être la pierre de rosette de son œuvre, le sublimement nommé Good, précis de Rodolphe Burger qui n’aurait pas la patience (qui en a encore encore dans ce monde en accéléré) de connaître votre œuvre de A à Z, de Kat Onoma à Burger.

Toi lecteur, cela ne te dit rien, non cela ne te rappelle rien, ou si peu, pas même une langue de chat ou une ciguë concubine d’une revue sur une table basse dans une chambre. Jamais le roi, pas même celui d’une épiphanie conviviale et rédemptrice d’années de soumission, Rodolphe Burger creuse un sillon, traçant un chemin via un labeur bien loin de l’image erronée que des critiques aux éjaculations précoces peuvent emmètre. Avec Good il semble récolter les fruits, ceux des chevaux en mouvement de la non-pratique du sport ou des spectacles météorites. Impossible d’en dire plus que ce qui est dit lors de son interview pour ADA, peut être si. Dire l’émotion. Palper celle-ci pour la dessiner, la tracer sur ces lignes, la modeler en essayant de toucher du doigt la beauté d’un « Poème en Or ». Tout est en liaison avec le passé. Tout nous ramène vers le passé. Mais tout est lié vers un futur. C’est la force de ce disque, se tourner farouchement vers son propre passé pour avancer avec une forme de rage (Fx of Love) les bras creusant de façon profonde la terre pour un appui fort et puissant. Jamais usé, l’homme Rodolphe fouille dans les interstices de l’histoire de la musique pour nourrir des plantes nouvelles à la naissance incertaine.

Il y a cette voix, cette diction qui aura bercé et bercera (Tu veux un conseil, un conseil d’ami dans « Providence ») encore longtemps mes heures de chavirage vers les berges de la musique, celle qui nous évitent les mauvais temps, les dépressions même épisodiques. Il y a cet irrémédiable désir de faire fondre le blues dans un creuset nouveau chauffant via les flemmes d’une langue tout aussi docile et bienveillante qu’ardue et piquante pour qui n’aime pas l’inconfort.

Avec Good, Rodolphe Burger n’a peut-être jamais autant été à la proue de sa carrière amirale, tranchant les brumes possibles pour laisser une trainée des incertitudes probables. Déconcertant, à la mémoire longue (salut c’est Ralph sur « Painkiller ») ce disque échafaude une pêche presque machiavélique, emportant dans ses filets les poissons perdus et probablement les bancs qui n’avaient pas encore été connectés. Very Good.