Mes bras enroulés à ta taille rebondie me font songer aux anneaux de cette planète lointaine qu’un jour peut-être on oubliera. La tête ailleurs, j’écoute l’astre qui chante, tel un écho des pleurs du Premier Homme, le même qui, invoqua dans les flammes celle qui dansa pour lui jusqu’au lever du jour.
Je me cramponne à toi, toujours, car la folie me guette. Tapie dans vos silhouettes, m’épiant de derrière vos âmes creuses, au milieu de la vie, à l’article de la mort, elle bouffe les souvenirs des autres en ricanant. Son ventre noir, boursouflé, s’étire et crie un peu plus fort à chaque nouvelle rotation. Des galaxies au goût féroce furent inhumées à la lueur des torches, ici même. Si tu observes bien, entre les pattes des deux molosses, tu y verras les restes de notre monde. Ils aiment faire rouler ces boules de restes sous leurs griffes de cristal, courir après dans le désert et les renifler. Le soir, lorsque les étoiles se couchent, ces dignes bêtes s’enfoncent légèrement dans le sable, l’échine luisante tendue vers le ciel, immense, leur boule de souvenirs calée à portée de museau. C’est un trou d’homme, un trou sans fond qui est à l’origine du Bing Bang et de la colère des Dieux, floués par l’arrivée de ces bipèdes à l’Ego détraqué.
Mais je vais bien, puisque je suis là, ma tête lovée dans ta peau crémeuse, perdu dans une Voix lactée des sens tout imprégnée de nos espoirs.
Alors que le changement de décennie aura laissé la plupart d’entre nous sur le carreau, la gueule béante, l’âme sèche et le coeur vidé de toute inspiration, Letherique débarque fusils aux poings avec Emergence Pt.2, un EP d’une fraîcheur quasi inespérée. L’artwork, d’une beauté magnétique, reflète terriblement bien la portée du voyage pour lequel on embarque. Ursa Bella ouvre délicatement le bal, à la manière d’un corps céleste à la dérive dans le Cosmos - en attestent les crépitements épars dont le morceau est truffé. Mais on sait faire la teuf, là-haut ! Lorsque les kicks débarquent franchement, on plonge complètement dans une foule de corps célestes en transe, sans limite de foi ou d’âge, et ça fait un bien fou. Ursa Minor, morceau génial comme pas permis, me fait songer à la romance moite d’une étoile à la recherche de sa Terre, éperdue et délurée, d’un charisme d’ours aux pattes de velours. Et c’est bien l’ultime track qui me fait chavirer. Vale Mae Ursa colle des frissons d’extase à chaque écoute, mon royaume pour l’équilibre entre la mélodie principale, les échos satellitaire noyés dans les souvenirs au fond, là, et ces putains de battements de coeur robotisés, syncopés, témoins d’un bouillonnement terrible, douleur de Trou Noir vibrant à la barbe des étoiles, dis-moi un peu, jolie planète aux reflets ocres et francs, y’a t-il une place pour nous, entre les pattes des chiens stellaires ?