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Le grand truc du genevois Raphaël Julliard, c’est la torsion. Docteur en anthropologie, mais également artiste protéiforme – vidéos, dessins, sculptures, théâtre – dont les œuvres furent présentées aussi bien au Musée d’art moderne de la Ville de Paris que dans les Kunsthalle de Berne et Saint-Gall, il investit le champ du réel pour mieux le détourner. On le verra notamment exposer un chat embaumé : sachant que, dans l’Égypte ancienne, la momification était synonyme d’immortalité, voilà confirmée, mais dans un passé lointain, l’expérience de pensée formulée par Erwin Schrödinger. Tordre les concepts mais également tordre les mots, tordre pour soustraire, tordre pour agglomérer, tordre pour jouer avec les sons et les sens et même le silence. En 2002, en guise de clin d’œil à Andy Warhol, Raphaël peignait deux boîtes de thon superposées : une peinture thon sur thon, le ton est donné (ah ah), nous voilà prévenus, et la lecture des titres du mini album Cousu de fil rouge – au hasard, Samba les couilles – augure d’un road trip en Absurdie, sous l’égide de (précisons que c’est la bio qui le précise) Katerine, Chilly Gonzales et un Serge Gainsbourg en fin de parcours. Prometteur ? Flippant ? On verra bien, même pas peur, let’s go. De Y’a un yakuza dans mon jacuzzi à Les Arcenciels, Raphaël Julliard se fait le chantre d’une pop lo-fi déglinguée poussée à l’extrême, bâtie à coups de boîtes à rythmes cheap, de nappes et ponctuations synthétiques, de samples improbables et, surtout, de textes hautement dadaïstes, chantés voire rappés (flow 80s garanti, à la Début de Soirée) d’un ton dégagé. Alors, quand sur Hey Perdedor il embarque Beck et The Beatles pour un réjouissant crossover entre Hey Jude et Loser, et qu’en plus ça fonctionne, on ne s’étonnera plus de rien : ni le détournement du Carmina Burana de Carl Orff sur Cuicui, ni la reprise funky soul de Another Brick On The Wall, et encore moins de bien douloureux questionnements métapataphysiques (« Kant ou brocante / c’est de la philosophie / Kant ou brocante / tu as raison de pas choisir ») ne brideront notre plaisir. Cher Raphaël (ainsi que tous ceux qui sont en dessous de toi, peu importe si c’est dans un lit ou un castell), on samba pas les couilles, composition par ailleurs plus mélancolique que son intitulé joyeusement nihiliste. Aux plus curieux d’entre-vous, un lien pour prolonger l’aventure - https://www.raphisme.ch/ - et les autres, rendez-vous à Thaon-les-Vosges en novembre prochain, pour le salon Cousu de Fil Rouge, dédié aux métiers d’art textile et mode. Yo !




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