Best fucked up Brest band of the world : titre que l’on ne contestera pas à David Jestin et Xavier Guillaumin, tant le nouvel album de Dernier Cri confirme la singularité du duo finistérien. Après Vive la nuit (2017) et Faune (2019), voici Le pire du pire empire, soit – en huit titres gorgés de sonorités synthétiques – la sensible et rageuse recension de nos névroses, intimes ou collectives ; entre les deux, quelle différence ? Un slow + du love = il pleut de la mélancolie : s’ouvrant sur le poisseux L’heure du Slove, dont l’ambiance crépusculaire est magnifiée par des arpèges d’orgue hypnotiques et une boîte à rythmes vintage (TR-808 ? TR-909 ?), L’empire du pire empire décline l’électro à toutes les sauces (piquantes – il faut bien ça pour accompagner les mots crus de David, crus et tendres). Techno house (Alain Techno is Dead narre les fêtes pourries d’une autre époque, à Saint-Martin ou Lesneven – Dernier Cri, terroir garanti), trap / doom (le lancinant Dépyramidez), indus (l’oppressant Commandeurs/Livreurs), new wave (Une chanson qui te ressemble) ou trip hop (le poignant Mâchez-moi), les instrumentaux bleu-acier de Xavier, taillés sur mesure pour le chanté parler de David, se tiennent néanmoins à bonne distance de toute chapelle. L’orthodoxie, c’est pour les autres. En témoigne cette lynchienne reprise du Chiqué, Chiqué de Christophe, chanson elle-même en son temps réinterprétée par Dominique A, version étonnamment lumineuse, et quitte à parler de vedettes de la variété française, quid d’un vrai Ti-Zef, que le duo évoque dans le conclusif Miossec en K7 ? Fabuleux exercice de hip hop shoegaze et liquide, prends ça M83 ! Oh non, Dernier Cri n’a pas fini de se taire.
(désolé pour cette conclusion pourrie, mais quel plaisir que d’imaginer les visages de David et Xavier me lisant, puis s’étranglant, genre « quoi, mais il n’a pas osé, ce ^$*ù !!!)