Vous l’avez certainement remarqué, ma production de chronique est aussi prolifique en ce moment qu’un arbre fruitier en plein mois de décembre. Manque de temps, d’inspiration, d’envie (ne rayez aucune mention.), comme si la croisée des chemins longtemps perçue comme un mirage était devenue réalité, et que le, « c’était mieux avant » devenait le mantra que j’allais avoir plaisir à distribuer comme la sentence ultime de mes avis fatigués.
Pas un paradoxe prêt, je décide quand même « d’éponger » le retard des disques proposés, comme des offrandes que j’ai toujours acceptées comme telles, même quand il s’agissait d’un groupe bulgare reprenant de la variété française en yaourt (ah l’humour me perdra.). Histoire de rendre la situation aussi comique que possible, j’ai choisi Sheraf, déjà, car la pochette me rappelle les paysages des vacances approchantes. Ensuite, et surtout, car Sheraf fait partie de la maison. Deux participations à nos compilations, et une discographie suivie ici, mais qui commençait à prendre des atours d’une nostalgie aux yeux humide, sans nouvelle depuis The Third Coming en 2015. Mais pourquoi comique allez, vous me dire ? C’est assez simple, tel un coureur de fond qui sort d’une rupture du tendon d’Achille, le retour sur marathon ne se fera qu’après une montée via des distances plus courte. Dans mon cas, il aurait été logique de commencer par un EP six titres, histoire de me dérouiller et de me convaincre que je suis encore capable de vous parler musique avec un rien de pertinence. Highs and Lows, n’est pas un EP, pas non plus un simple album, il est à ranger dans la catégorie des doubles qui s’ignorent, avec 20 titres. Une somme pourrions nous dire même, autour de la pop-music dans ce que cette musique a de plus riche. Un précis d’une justesse rare, qui sait piocher dans son passé (la relecture de No Gatecrasher me fait dire que Sheraf n’est définitivement pas un groupe comme les autres) s’aventurer en terre inconnue dans la langue de Molière sur un Bien Loin qui pourrait pour l’occasion former un cousinage avec Malik Djoudi, et continuer à creuser un sillon riche, positionnant Raphaël Campana comme un Jason Lytle à l’ouverture d’esprit encore plus grande. Alors ne comptez pas sur moi pour vous décrire l’intégralité du disque, j’en suis incapable sans tomber dans ce qui pourrait s’apparenter à un roman fleuve, et le disque mérite plus que cela. Il mérite que nous écoutions ces facettes multiples, cette folk solaire, cette pop qui ne s’interdit pas d’occuper l’espace (We’ve ruined everything exemple parmi tant d’autres de l’étendue du talent) cette façon de s’inscrire dans l’histoire de cette musique en y posant sa marque. Comme Syd Matters ou Aetherlone par le passé, Sheraf signe ici un disque monumental, dans sa durée, dans sa profondeur, par sa lumière. L’année a trouvé son chef d’œuvre, et moi, j’ai retrouvé l’envie grâce à lui. Prodigieux.