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Le chanteur charismatique Simon huw Jones ne sourit pas souvent, il faudra attendre la fin du 3e morceau pour que les applaudissements soutenus d’un public hypnotisé lui chatouillent les muscles des joues. Il a le regard de Jean Baptiste Grenouille au sortir de la grotte dans laquelle il a fait corps avec la pierre dans la pénombre pendant 7 ans (héros rejet du monde du célèbre roman "le Parfum" de Suskin). Lorsque le guitariste, son frère Justin échange sa guitare pour l’accordéon, l’ambiance se fait Tzigane, non sans rappeler le fameux cirque des "ailes du désir", où Nick Cave dans toute sa splendeur d’antan nous coupait le souffle au beau milieu du film avec "the carny"... Le cirque a quitté les abords de la ville laissant au beau milieu du terre plein quelques détritus attendant d’être emportés par le vent... La contrebasse Ian Jenkins entame une marche en marquant les temps, comme un monsieur muscle il pince les cordes de son instrument tout en chantonnant. Le décor est planté, on suit une caravane, le paysage défile sous nos yeux, entre deux villes, la route est longue, et les paysages qui se succèdent ne se ressemblent pas, aussi lorsque Emer Brizzolara au cymbalum qu’on appelle piano tzigane fait vibrer ses cordes, on est projeté dans le désert, on pense à Morricone, le désert ne finit jamais, la caravane marque une pause pour admirer le levé du soleil, le morceau s’achève. Le public est plongé dans le spectacle qui monopolise tous ses sens, j’ai l’impression en me retournant pour regarder la mine des gens, d’être dans une salle de cinéma en plein climax. Simon est un revenant, mystérieux, nul ne sait où la transformation de cet homme a eu lieu, mais je me plais à penser, que c’est une longue introspection qui l’a amené à cette authenticité dans la voix et dans la gestuelle. Aurait-il été en contact de sages Africains, aurait-il bénéficié d’une initiation au Bwiti (arbre de la connaissance au Gabon, cf lien). Chaque mouvement, chaque pli de sa peau semblent posséder une vérité, un secret, un trésor. Au bout de son bras droit, sa main semble avoir une vie propre, ses doigts se pliant et se dépliant comme un animal exotique, son coude cherche toujours à rivaliser de hauteur, comme s’il voulait narguer le sommet de son épaule .Il termine le concert recroquevillé sur lui, comme abandonnant son corps, il s’efface de la scène, là où plane encore son âme. Le public les rappellera 3 fois. Sur un des rappels, son frère Justin, possédé lui aussi , se déplace en diagonale, le manche de sa guitare dessine des courbes, sans jamais dépasser les limites géographiques de la scène qui le séparent de Simon, sauf sur ce rappel, où il se glissera furtivement derrière lui, ce dernier en se retournant, l’assommera d’un regard de loup. Ce regard si particulier peut donner l’impression qu’il est en colère, je pense au contraire qu’il est en paix, sa lucidité aiguë s’exprime par une sensibilité extrême, le corps devient langage de l’âme. And also the trees révèle à son public les profondeurs de l’être.

En savoir plus sur le Bwiti : http://julienbonhomme.ethno.free.fr... http://fr.wikipedia.org/wiki/Bwiti

L’album acoustique d’AATT "When The Rains Come" est disponible.

Quelques vidéos glanées sur YouTube du concert : http://www.youtube.com/watch?v=bnTZ... http://www.youtube.com/watch?v=LIHT...

Crédit photos : Guillaume Sautereau