Je vais prendre un risque. Pas aussi grand que celui de sortir un projet de loi sur la castration chimique le lendemain d’un viol mortel, mais quand même. Je vais chroniqué un disque, après une seule écoute, une écoute unique entre la station Pont de Neuilly et la Gare du Nord, une distance infime si nous la rapportons à celles parcourues pour un tour de la Galaxie. En n’en sachant autant sur ce groupe que le sentiment d’amour que l’on peut porter à Frédéric Lefebvre, j’ai plongé dans ce disque comme dans une eau tourmentée, cachant son fond. Mais pourquoi ne pas l’écouter plus avant d’écrire cette chronique. Et bien c’est aussi pour alimenter la caverne des remords, lieu de piété des emballements précoces. Mais c’est avant tout pour garder en écrivant ces lignes l’enthousiasme encore vif, le véritable plaisir de s’être fondu dans ses œuvres pharaoniques, sans une once d’onirisme béat, avec l’unique fonction de faire cohabiter la soul et des sons hybrides, comme si Galliano revenait en lamé, après une reformation dictée par le simple désir de changer le monde, en l’occupant à danser. « Fruit » est un objet de son temps qui aurait quitté l’hyper espace pour ne pas manquer d’air trop longtemps. Disque pressé, au sens d’en retirer un nectar nécessaire à la survie, « Fruit » joue des allitérations qu’elles soient verbales ou musicales pour en faire des nuées de poussières d’étoiles qui nous en mettent plein la vue. Joueur et avant tout source d’un plaisir physique, « Fruit » utilise la basse et les beat box pour le corps, et les comètes sonores pour le rêve. Un coup de cœur furtif ou pas, nous saurons avec du recul si « Fruit » est une simple étoile filante, ou une comète nous rendant visite périodiquement. De mon côté j’opte pour la seconde proposition.