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Lilium Sova...toute une expérience. Ce disque est une des meilleurs claques que j’ai prises ces derniers mois. J’en avais déjà parlé, mais il se trouve que nos chers amis suisses vinrent frapper à la porte d’ADA. Pas trop ce qu’on a l’habitude de voir par ici, raison de plus !

Donc attention : énorme album ! Il mérite certaines références dont j’use avec parcimonie tant rien qu’à les évoquer des frissons se mettent à me parcourir. J’ose donc dire qu’on a ici un reflet dans l’état d’esprit créatif et maladif des albums géniaux que King Crimson nous a offert avec "Lark’s tongues in aspic" et "Red" par exemple. Lilium Sova est de la même trempe, sans concession, en nous proposant la digression d’un insomniaque vers la folie en plusieurs phases.

Chaque titre sonne une heure de cette plongée nocturne dans le déséquilibre. La chute débute par "1.00 am Locked in Syndrome", nous introduisant par un beau riff rock, mais repris au vol par des cassures et dissonances. Un relent mathcore s’immisce et c’est l’ascension jusqu’à un riff pachydermique. Production exemplaire, la basse qui grogne, l’orgue fait de grandes ondulations en réponse à la basse et on finit dans le chaos, en nous rappelant au passage The Dillinger Escape Plan. Puis vient "2.00 am Insomnia" où on voit bien quelqu’un pris d’insomnie, se retournant dans son lit, assaillit par un gros rythme lourd sur lequel une basse hypnotique joue dans des registres distordus. Vient le sax, merveilleux, schizophrène, avec des delays, accentuant la distorsion du temps lors du sommeil. La partie qui suit est formidable. "3:00 am Call Of Sova" commence dans le chaos avant de proposer un groove énorme pour finalement s’évader dans une abstraction totale. Sova veut dire "hibou" et on s’imagine son vol et ses cris de mort avec les bruits électroniques (faits par un des nombreux invités du disque).

"4.00 Parasomnia" décrit par sa beauté maladive et calme une phase de sommeil profond...Au sax, on pourrait croire un Mel Collins partit dans un délire à la Coltrane. Tout ça sur une espèce de sourd fond sonore, comme une chape de plomb sur la conscience. Michael Borcard qui officie au sax tire des sons dingues de son instrument, le distord, y ajoute des effets pour cette dérive avoisinant les 8 mn. Le tout monte en intensité, comme un cauchemar qui atteint son pic.

Chaque titre mériterait une dissertation, mais ce disque doit en grande partie sa réussite à ses possibilités d’interprétation et à son audace, par exemple celle d’inviter Eugénie Gallay à l’accordéon sur "6.00 am Ondine’s Curse".

Je vous laisse donc vous immiscer dans leur disque qui finit en apothéose avec "8.00 am Epic morning". 22 minutes 22 de construction abstraite commençant par une intro rappelant Tool et ses rythmiques hypnotiques, puis une belle mélodie qui s’ajoute à cette construction en spirale, phase de sommeil agité. La suite vertigineuse nous happe sur une durée étirée. Suit un moment de grâce comme un éveil total avec orgue somptueux et quasi religieux tel que Jon Lord savait le faire. Le genre de passage intense, puissant et mélancolique que Shels n’aurait pas renié. Aurait-on une sorte de prog-core ? Pas fan des étiquettes, mais pourquoi pas !

Pour conclure, c’est une vraie une expérience, et l’absence de chant (sauf une exception de qualité d’ailleurs) est probablement un de ses points forts, rendant l’interprétation plus libre. En fait, on ne sait jamais ce qui va nous arriver, comme quand on se couche et qu’on se laisse aller au hasard du subconscient. Lilium Sova a un subconscient étrangement habité.

PS : Je conseillerais aussi à ceux qui écouteront ce disque de se pencher vers les noms cités, ainsi que sur des groupes tel Bumblebees, Hella, Bud Spencer et Naked City (pour le free-jazz cinglé).




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