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Dans cette époque sans certitude, il reste des vérités non alternatives ; PJ Harvey regroupe bien à elle seule toutes les qualités musicales que l’on attend d’un(e) grand(e) artiste. Pour finir de s’en persuader, allons donc écouter cette « Démo » De l’album To bring you my love. La maison de disque exhume les démos ? Est-elle donc morte ? Aurions-nous affaire à une nouvelle tendance des maisons de disque ? Un quart de siècle après, l’heure est venue de ressortir les vielles cassettes DAT avant qu’elles ne se démagnétisent. La date limite d’utilisation optimale est peut-être atteinte.

Pourquoi donc s’évertuer à chercher des raisons ? C’est tout de même une démo de choix, puisqu’il s’agit des prémisses d’un album réussi, qui a permis à cette artiste discrète du Dorset de s’exporter dans d’autres contrées et de connaître un succès largement mérité au côté de son acolyte et excellent musicien et producteur John Parish.

Vous ressentez ici à l’écoute (par exemple de Teclo), cette impression d’être vous-même présents aux côtés de la musicienne et d’être un instant devenu le microphone suspendu face à la chanteuse avec vue sur ses cordes vocales, dans une pièce, isolée et décorée de ces vieux tapis recouverts de câbles jack et d’accessoires que l’on retrouve inlassablement dans les studios et salles de répétitions.

La maitrise du jeu de guitare nous ravit, elle maitrise, mais c’est bien au niveau de la voix qu’il se passe « un truc » dans cette version démo : un sentiment d’étrange proximité, de présence à l’intérieur même de la cavité buccale de P.J. L’aspect charnel de son chant, au-delà du contenu des textes, nous projette dans une intimité avec la brunette et sa voix, tantôt gutturale tantôt sensuelle, tantôt énervée, tantôt discrète, jamais mielleuse.

C’est finalement un moment délicieux, en particulier pour les adeptes du rock teinté de blues de Polly Jean HARVEY de pouvoir plonger dans l’origine de la création de ces morceaux grâce à l’écoute de ces démos. Profitons, sans rougir, de cette opportunité et de cette connivence si surprenante avec cette chère Polly, en attendant de pouvoir la retrouver sur de nouveaux projets ou sur scène as soon as possible. Nulle obligation de comparer l’album studio avec sa version démo (enfin chacun fait comme il le souhaite, nous sommes, paraît-il, en démocratie). Voici une occasion de retrouver avec délectations ces mélodies qui nous ont passionnément écorchés les oreilles il y a maintenant plus de 25 ans. Il ne s’agit donc pas ici de découvrir l’étendu du talent de cette personnalité majeure du rock, (c’est un fait établi depuis l’album Dry), ll s’agit de comprendre à quel point, quand une artiste est sincère dans son travail, tout peut être évident, universel et intemporel, peu importe la production des morceaux.