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L’homme-canon est dans le fût. Roulement de tambour. Mise à feu et... Boum, c’est parti !

Un cœur qui bat. Voilà, ça commence comme ça.

« Ta peau est fine comme du papier à cigarette

Chaque fois qu’on la frappe il y pousse une violette »

Ambiance disco funk slap, sea, sex and seum, compression maousse pour faire baver le mp3, paroles premier trimestre de 4e. Tribute to Patrick Juvet (RIP) ?

Corinne Charby passe une tête par la porte. « Eh Clara, j’étais là avant ! »

« Et j’vis comme une boule de flipper qui roule

Avec les oreillers du cœur en boule

Et j’vis comme une boule de flipper qui roule

Voilier si t’as pas de skipper, tu coules »

Musique Christophe, (oui, the Christophe), paroles Jean-Michel Bériat (Frédéric François, Rose Laurens, Michel Sardou...). Ça supporte la comparaison, non ?

Dans une chanson parfaite de 1972, Stevie Wonder dénonçait la Superstition, épaulé par l’immense Jeff Beck. Association qui ne surprendra que les sots. Et ne surprenait personne à l’époque. Époque dorée ? Vue depuis 2021, peut-être, pour certains. Certaines. Vocabulaire inépuisable de motifs combinables à loisir, à l’infini, jusqu’à l’écœurement, l’indigestion, l’occlusion intestinale. Daft Punk avait pourtant semblé régler la question au début des années 2000, se retirant avec grâce tel Attila, après que la messe fut dite.

Le clip qui accompagne Le reste démultiplie le malaise. Citation appuyée des Demoiselles de Rochefort, ou plutôt d’une publicité pour des assurances-vie qui citerait Les Demoiselles.. Une ville parfaite, la France de toujours, sans dispositif anti-SDF, sans ferme industrielle, sans flash-ball. La France des sixties, refuge paresseux des consommateurs de France Inter, avec ses libérations certes, mais aussi ses 45 heures effectives de travail par semaine, sa moitié seulement de collèges et lycées mixtes en 1968, ses bidonvilles géants.

Il faut le dire : Clara Luciani chante un peu faux, souvent un peu en dessous de la tonalité. Cette voix d’alto un peu voilée, dont les notes les plus basses, androgynes, troublent l’auditeur candide, pourrait charmer. Quelque chose ne passe pas. Ne se passe pas. Une lumière. Une nécessité. Une urgence manque. Alors, cette fausseté, un nouvel aspect de la coolitude parisienne ? Des tympans sous cocaïne ? Un mauvais réglage d’Autotune ? Qui saura, comme disait Mike Brandt.

Et puis soudain (j’ai oublié le titre) : « Êtes-vous z’eureux en amour ? » Liaison très dangereuse. Gérard Rinaldi (RIP) a-t-il collaboré aux paroles ? Les Charlots sont vénérés par quelques musiciens expérimentaux fans de Raymond Roussel et Moondog. Mais dans ces chansons post-Covid, la folie de l’un et la grâce de l’autre ont pris leurs cliques et leurs claques avant d’aller faire crac-crac dans quelque crique méditerranéenne.

Mais l’homme-canon dévie de sa trajectoire. Revenons à nos moutons.

« On n’épouse pas les chanteurs

C’est vouloir enfermer le vent

C’est vouloir épingler un papillon

C’est vouloir enfermer un li-on »

Oui, un li-on, étrange diérèse qui fait perdre encore un peu plus de sens à ce brouet, cette purée de clichés avec de vrais morceaux de guimauve dedans. Et je n’en suis qu’à la troisième chanson. Merci Gérald pour ce cadeau. Je souffre, mais je rigole quand même.

Grosse basse fonky, violons Car Wash, paroles insensées, brassage d’air maximal. J’entends déjà tout ça dans mon Carrefour Market préféré au moment où ma main saisit une plaquette de chocolat soi-disant bio.

Clara Luciani essaie de prendre la place depuis trop longtemps laissée vacante par Zazie (RIP) (euh non, pas RIP). Comment donner l’impression qu’on a quelque chose à dire quand on fabrique une pizza ananas / Knacki Herta / Babybel ? Le défi est de taille, et le risque d’élongation musculaire, très grand. Le Synthol a été commandé par caisses entières, je suppose. J’espère.

Après cette avalanche de gros çons, J’sais pas plaire paraît presque agréable, avec ce souffle d’ampli sur guitare réverbérée, cette mélodie... Et soudain Clara ose le verbe s’émouvoir au futur simple, 3e personne du singulier, « il s’émouvra ». Était-ce indispensable ? Maître Capello, qu’en pensez-vous ?

Julien Doré vient chanter trois notes (mi, fa et sol, hihihi) sur une chanson très facile à chanter.

Et puis bam c’est reparti. Faut remplir l’albome. Allez, une petite descente chromatique de bon aloi, ça fait toujours vibrer le cœur des amoureuses délaissées, des amoureux solitaires. Là, je sais pas trop de quoi ça parle, les paroles ne sont pas claires sur le refrain, en accords majeurs comme il se doit. On sent bien la fatigue. Les claps sont ceux d’une chanson entendue plus tôt dans l’album.

Dernière chanson, Au revoir, « Quand j’aurai tout chanté, je me tairai ».

Je laisse ici le lecteur, la lectrice s’offrir la blague de son choix (envoyez à la rédaction, qui transmettra).

Un cœur qui bat. Voilà, ça finit comme ça.

Bon, eh bien tout ceci m’a donné envie d’écouter Peter von Poehl, Elliot Smith et Kings of Convenience. Merci Clara.




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