Mélange des langues, mélanges des genres, le groupe Stranded Horse se balade dans un monde sans aucune frontière et nous invite à contourner les conventions musicales avec lui en voyageant à travers tous les continents. Les morceaux de l’album Grand Rodéo nous racontent alors un récit bien sombre. Celui d’un cavalier plongé dans un univers à la dérive, proche du chaos, dans un monde qui le dépasse, où l’homme se raccroche pourtant et continue d’avancer dans une atmosphère chargée de terre ocre quasi irrespirable laissant peu d’espoir (voir les visuels qui accompagnent l’album réalisés en collaboration par Yann Tambour et Jasmine Bannister).
Cet opus bercé par la mélancolie se veut-il une réflexion sur le monde d’aujourd’hui et les perspectives bien alarmistes ? (Enfin… Si l’on décide d’ouvrir grand les yeux, car il est aussi possible de partir à Dubaï kiffer et faire des selfies en mangeant des steaks recouverts de feuilles d’or, c’est au choix, c’est aussi ça 2021, un monde où des fossés abyssaux se forment entre les humains).
Yann Tambour évoque son style musical en parlant de Folk Crépusculaire (les précédents albums étaient classés comme de l’indie Folk word, bref, inclassable et tant mieux).
Il est vrai qu’une certaine noirceur reste bien présente en filigrane de l’album, mais comme souvent avec le crépuscule, le jour et la lumière ne sont pas si loin. Ne serait-ce par la douceur et la chaleur du timbre de la voix de Yann Tambour, l’espoir n’est pas éteint. On s’amusera également des contradictions de morceau comme la Rumba du trépas qui invite par son rythme chaloupé au déhanché mais accompagné de paroles bien noires parlant d’apocalypse et de pieu dans le dos.
Le son de la guitare folk de Yann Tambour, le son de la Kora de Boubacar Cissokho, et les percussions atypiques de Sébastien Forrester, le travail des chœurs mais aussi les arrangements et le jeu de Miguel Bahamondès-Rojas multi instrumentiste franco-chilien au violon et au clavier ; toutes ces personnalités et ces univers fusionnent et baladent parfois nos oreilles du côté des chants traditionnels et de leurs boucles qui amènent à la transe.
Certaines ambiances fonctionnent comme si l’on découvrait la culture musicale d’un pays lointain et inconnu sorti de l’imaginaire de ces musiciens cosmopolites. Ces artistes - qui après avoir eux-mêmes exploré le monde et sa richesse musicale - sont bien décidés aujourd’hui à nous faire voyager avec eux.