> Critiques > Labellisés



Stockholm, un soir d’octobre 2005. Après une première partie signée Crooked Fingers, merveilleux concert que celui donné au Debaser par l’homme orchestre Andrew Bird, égrenant seul en scène les perles de son troisième opus publié quelques mois auparavant, le très attachant Andrew Bird & the Mysterious Production of Eggs. Je me rappelle m’être félicité d’avoir bon goût, mais surtout d’assister à un exercice musical de haute volée, le natif de l’Illinois jonglant avec maestria entre violon, guitare et looper : finesse, virtuosité, simplicité, le tout au service d’une pop folk baroque et décalée jamais oiseuse. Il faut dire que le multi-instrumentiste n’était pas un perdreau de l’année. Influencé par Claude Debussy tout autant que par le jazz old school, il sera membre de Squirrel Nut Zippers et collaborera (entre autres) avec The Handsome Family, Fiona Apple et Emily Loizeau, jusqu’à être par deux fois nominé aux Grammy Awards, pour les albums Are You Serious (2016) et My Finest Work Yet (2019). Extrêmement prolifique, Andrew Bird a sorti au printemps dernier un recueil de reprises de standards du jazz (Sunday Morning Put-On), mais c’est avec l’intrigant Cunningham Bird qu’il fait son retour en ces pages. Intrigant, parce que le fruit indie folk d’une collaboration avec la californienne Madison Cunningham, ayant pour objet la réinterprétation de Buckingham Nicks, un four critique et commercial enregistré en 1973 par le guitariste Lindsey Buckingham et la chanteuse Stevie Nicks, que l’on retrouvera deux plus tard au sein de… Fleetwood Mac. Quelle mouche a piqué Andrew et Madison, au-delà de la noble intention de ressusciter une « underrated gem » ? « The best reason to cover anyone is that little part of you that thinks you might do it better » : pas question d’en écouter la version originale, le dépassement de fonction, ce n’est pas pour moi, mais au nom de la grande affection que j’éprouve pour Andrew, je me lance : du catchy Crying In The Night à la complainte bourdonnante Frozen Love, les dix titres de Cunningham Bird sont un régal de délicatesse et de musicalité, entre folk expérimental (Stephanie), pop orchestrale minimaliste (Without A Leg To Stand On) et country lounge (Long Distance Winner), toutes mélodies, harmonies vocales et cordes pincées dehors. Et quand la batterie se pointe sur l’enlevé Don’t Let Me Down Again, Andrew et Madison, dont les chants se marient à merveille, nous voilà plongés sous le soleil d’Appalaches imaginaires nimbées de psychédélisme. Le reste de l’album est à l’avenant, ciselé et néanmoins souple, souple de la souplesse d’artistes caméléons au registre si large qu’ils ressuscitent même les œuvres profondément enterrées dans le cimetière de la pop music. Décidément, Andrew Bird est un drôle d’oiseau, unique et inclassable, à chérir absolument.




 autres albums


aucune chronique du même artiste.

 interviews


aucune interview pour cet artiste.

 spéciales


aucune spéciale pour cet artiste.