« L’une des plus belles collections de morceaux noisy post-punk made in France depuis WC3 et Planète Zen », écrivait-on sur ADA à propos du EP Clown Clown Dead, publié en 2022. Passant de vie à trépas, le poisson rouge Edgar a (indirectement : il fallait bien monter un groupe de rock pour surmonter son chagrin) donné naissance au trio parisiano-bordelais Edgar Déception, qui nous revient avec un nouvel album (le second) à l’intitulé minimaliste, étrange et espiègle – Ption (décès… ption, vous l’avez ?) (toi, au fond, qui dors et dis « je gombrends pas », fais un effort). Placé en milieu de playlist, unique morceau chanté en français, une mignardise de mots absurdes et de chœurs empilés, j’adore, Le Voisin et le Serpent détonne par rapport au reste du disque et peut se percevoir comme le lointain cousin de La Mer, inénarrable adaptation d’un titre de The Jazz Butcher, que l’on retrouve sur le premier opus des Little Rabbits, Dans les Faux Puits Rouges et Gris (1991). Si j’évoque les Petits Lapins nantais, c’est qu’à l’instar d’Edgar Déception, ils faisaient à leurs débuts preuve d’un éclectisme tout terrain, qui les voyait fricoter aussi bien avec la noisy pop que le rock lo-fi néo-zélandais et le bric-à-brac façon Robert Wyatt, La Mer étant la fausse (bonne) piste qui certes confortera leur succès mais qu’ils durent par la suite porter comme un fardeau. Éclectiques, Eva, Tessa et Valentin le sont indubitablement : de l’inaugural Be By My Side, bulle grungy lo-fi évoquant Sebadoh, Weezer et Chris Knox au génial Home Sweet Home (pas de batterie, uniquement des cordes de guitares et de basse qui s’entremêlent et se répondent, le tout porté par des harmonies vocales délicieuses : Young Marble Giants meet The Breeders), en passant par les éruptions punks (Do You Love Me Leo And Sandy ; Don’t Steal My Bike) et les mignardises sixties (la pop sucrée de Happy New Year), voire late fifties (Tchou Tchou I Love You, étonnante love song en ternaire sur fond de boîte à rythmes cheap, de guitare surf lounge et de chalalas d’anthologie), le trio se fait fort de n’être jamais là où on l’attend, faisant de Ption une boîte de Pandore de laquelle ne jailliraient que des bonnes surprises – une fois encore, Edgar Déception ne vous décevra pas.