Désormais articulé autour de Kingsley Hall et Robbie Major, Benefits (from Teesside, au nord de Middlesbrough – ça s’entend) confirme le retour en grâce d’une certaine Angleterre électronique 90s, telle que mise en musique par Leftfield, Orbital et autres Underworld. Il suffira d’écouter l’ébouriffant Land Of The Tyrants (feat. Zera Tønin, moitié de Arch Femmesis), l’intense Blame (voix distordue, dynamique PiL, phrasé Sleaford Mods : sorry, impossible de ne pas évoquer le duo de Nottingham dès lors qu’il s’agit de chroniquer un disque de spoken word) et le moins convaincant The Victory Lap (too smooth) : gimmicks rétro, sonorités vintage, production mate – techno is back. Mais passer le second album de Benefits au tamis de références surannées (mises en avant par de biens paresseux attachés de presse) serait une erreur, tant Kingsley et Robbie voient plus large : kaléidoscope tout autant que montagnes russes et melting-pot, Constant Noise racle les coins et recoins de ces dernières décennies british, de l’incantation punk bruitiste Lies And Fear (derrière les fûts, Neil Cooper, de Therapy ?) au dancehall Divide (with Shakk au mic), en passant par le délicieux Relentless, qui rappelle TV On The Radio (le contraste entre la quiétude instrumentale et la tension rythmique) et offre à Pete Doherty une occasion en or de s’éloigner de son camembert chéri. Si l’on met de côté le jubilatoire Dancing On The Tables (hip hop mutant, ambiance poisseuse, on se croirait chez The Streets, avec des basses distordues à la Mr. Oizo), Constant Noise est indéniablement moins frontal que son prédécesseur, Nails (2023) : une moitié de morceaux calmes disséminés ici et là, l’introductif Constant Noise (a cappella sur fond de chœurs réverbérés – très joli), le magnétique Missiles et l’intermède Continual, anecdotique ; certes Benefits élargit sa palette, mais un peu trop à mon goût – Everything Is Going To Be Alright (empilement de sonorités cristallines) est interminable, tandis que le lounge Burnt Out Family Home, sur lequel croone Kingsley, s’avère gênant (sourire crispé). Okay mon joli coco, la tracklist est longue et décousue, mais on s’en fiche, c’est un disque de spoken word, donc ce qui compte, ce sont les textes (au demeurant saignants), non ? Oui et non, et plutôt non. Moi, je veux lire un texte, je lis un livre… (ah ah, please, ne me prenez pas au premier degré, je ne suis qu’amour). En définitive, si indéniablement Constant Noise mérite le détour, il aurait gagné à être plus ramassé – on va dire qu’on n’est pas passé loin d’un excellent album.