« These are the songs of a person who was brought back to life but is now haunted by death itself. » L’intitulé du nouvel album d’Ashanti Mutinta, rappeuse zambo-canadienne from Montréal, évoque tout autant le Ask the Dust de John Fante que le Dust N’ Bones des Guns N’ Roses (« He lost his mind today / He left it out back on the highway ») : dès lors qu’il est question de se sentir à côté de ses pompes, l’art nous fournit quantité de figures tutélaires improbablement compatibles. S’éloignant de la formule hip-hop / metal / post-rock qui l’a menée au sommet critique (la trilogie God Has Nothing To Do With This Leave Him Out Of It - 2020 ; I Lie Here Buried with My Rings and My Dresses - 2021 ; His Happiness Shall Come First Even Though We Are Suffering - 2022), Backxwash se lance dans un jeu de pistes mémoriel aussi dense qu’épique, entre gospel mutant (la litanie minimaliste Black Lazarus, portée par un beat sec, des basses sourdes, des synthés vrillés et un lit de chœurs entremêlés – poisseux, lumineux, parfait), électro horrorcore (la pièce maîtresse Wake Up, beat azimuté, chant au bord de la rupture, pont lounge kitsch 70s, un zeste de Blaxploitation – ça donne envie de réécouter Insane Clown Posse) et trip hop intense teinté de jungle (9th Heaven) : une des grandes forces de Only Dust Remains réside dans le contraste entre les rythmiques enlevées et les boucles de voix féminines, mélodiques, organiques, éthérées. Et puis il y a le magistral Dissociation, beat saturé, guitares cotonneuses, textures shoegaze, qui malgré son vocodeur taquin s’avère – par sa production boueuse – digne de TV On The Radio : sommet, featuring Chloe Hotline ; tout autant que l’électro kaléidoscopique History Of Violence, scansion volontariste, motifs répétitifs et couches de synthétiseurs qui s’échinent le long d’une grille d’accords mélancoliques, épique. Il ne faudra rien de moins que le lounge synth-gospel Only Dust Remains, invitant Pet Wife, Magella, Fernie et Morgan Paine, pour atterrir en douceur, tant le nouvel opus de Backxwash nous aura emportés (haut) – flow naturaliste, textes rageurs, instrumentaux inventifs tout autant que roués, noirceur jamais définitive, la lumière au bout du tunnel : il fallait bien ça pour revenir à la vie.