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Ébouriffant. Si vous êtes accro à la série animée trash Rick and Morty, il est fort probable que vous ayez sans le savoir croisé la route de clipping., le trio californien – fan de science-fiction (Dead Channel Sky est un emprunt au mythique Neuromancer de William Gibson) – y ayant glissé l’impeccable Stab Him in the Throat. Après un space opera afro-futuriste (Splendor and Misery, 2016), deux plongées dans l’horrorcore des eighties (There Existed an Addiction to Blood, 2019 ; Visions of Bodies Being Burned, 2020) et quelques saisons passées à remixer leurs propres œuvres, les Angelenos s’offrent une haletante virée vintage – big beat, acid, drum & bass, breakbeat, indus, rave, etc. – en terres hip-hop, porté par le tubesque Run It, étendard absolument addictif qui pourrait faire passer au second plan la radicalité politique de Daveed Diggs et ses acolytes. En effet, sur la forme (vingt titres, une heure, aréopage d’invités tels que Nels Cline, Tia Nomore et Aesop Rock) comme sur le fond (les horreurs dystopiques entrevues dans la littérature d’antan sont malheureusement devenues réelles, et nous n’avons rien fait pour lutter contre ça, trop occupés, le nez sur le nombril, à se laisser lobotomiser, puis arracher le cœur), porté par le flow dingue de Daveed et poussant l’art du glitch jusqu’à l’extrême (écouter le disque d’une seule traite = servir de punching-ball à William Hutson et Jonathan Snipes), Dead Channel Sky est indéniablement copieux – il m’aura fallu plus de deux mois pour en faire le tour. En procédant par analogie, je pourrais comparer le nouvel album de clipping. avec Night City, la tentaculaire métropole du jeu vidéo Cyberpunk 2077, qui s’éloigne à mesure que l’on croit l’apprivoiser. Ainsi l’émouvant Code, qui tranche avec l’urgence des morceaux précédents ; ainsi les (anecdotiques) intermèdes instrumentaux noise concoctés avec (ou sans, mais c’est pareil) le collectif Bitpanic ; ainsi la douceur inattendue du final de la tuerie Dodger – la tendresse n’est jamais loin ; ainsi le groove vénéneux de Keep Pushing et son refrain totalement WTF, contraste garanti ; ainsi un tiers de compositions qui se perdent en route, faute de ligne directrice – s’inspirer d’Autechre et Aphex Twin, c’est classe, les petites billes qui rebondissent sur le sol et les gouttes d’eau enregistrées avec un microscope, très bien, mais on s’ennuie un peu, non ? Imparfait mais vigoureux, inventif et investi, Dead Channel Sky ne brille que par intermittence, sauf que quand ça brille, c’est direct le sommet – déjà mieux que la plupart des disques que j’ai pu écouter cette année.




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