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Xavier Plumas, de Tue-Loup, rencontré juste avant son concert donné à Vendôme lors des 25ème Rockomotives.

Patrice Lecot : C’est la 4ème fois que Tue-Loup est programmé au festival des Rockomotives, après 1998, 2003 et 2006 (plus 2 participations sous ton nom), on peut dire que tu es un des recordmen des participations ici ?

Xavier Plumas : Il faudrait demander à Richard (Gauvin, le programmateur). Je pense que peut-être Gablé ou Yann Tiersen sont aussi dans les plus récurrents, ou plus encore Olivier Mellano mais lui il fait tellement de projets différents... En tout cas, c’est un bonheur de venir jouer ici ! Je commençais à m’impatienter, je me disais : « quand est-ce qu’ils vont me ré-inviter ? »

Patrice Lecot : Qu’as-tu vu comme changements dans ce festival depuis que la 1ère fois en 1998 ?

Xavier Plumas : Il n’y en a pas tant que ça. Je trouve que la motivation des gens qui gèrent le festival et des bénévoles qu’ils arrivent à générer autour d’eux est restée intacte et c’est admirable. Ce qui a changé, c’est peut-être la programmation, mais c’est normal. L’équipe du festival ce sont des gens qui restent curieux donc ils continuent à faire découvrir plein de choses...il y a plus de programmation éléctro qu’en 1998 mais je trouve ça très bien ! La variation des lieux est un plus : essayer sans arrêt de surprendre, comme ce qu’on va faire ce soir : jouer dans un lieu atypique annoncé au dernier moment pour le public, je trouve ça super (un concert dans une salle de conservatoire de musique à 18H00) !

Patrice Lecot : Jouer avec Tue-Loup « en marge », c’est à dire ni à la Chapelle St Jacques ni au Minotaure (qui sont les 2 lieux principaux des concerts du festival), c’est quelque chose qui te plait aussi ?

Xavier Plumas : J’exagère à peine en disant que je préfère en fait ! Depuis plusieurs années, j’ai tellement de mal à faire tourner mes projets ; que ce soit Tue-Loup, son mon nom ou d’autres projets divers et variés ; que je ne joue que dans des lieux atypiques du fait que ce soient des réseaux alternatifs de gens qui ont envie de programmer des choses en dehors des circuits, puisque les circuits ne le permettent pas. Je n’arrête pas de jouer dans des galeries de peintures ou dans d’autres lieux improbables. J’ai même joué dans un couvent désaffecté il y a 3 semaines à Alençon. J’adore jouer dans des endroits pas prévus pour.

Patrice Lecot : ...et dans ce contexte, le public vient vraiment voir Tue-Loup, plutôt que 5-6 groupes dans une soirée.

Xavier Plumas : Oui, c’est sûr. Comme on est les seuls à jouer ici, à priori ceux qui viennent sont là pour nous voir mais j’espère qu’il y a des gens qui vont venir par curiosité. Je crois qu’il y a pas mal de gens - et c’est l’intérêt des Rockomotives - qui viennent de loin juste pour la qualité du festival, pour découvrir des choses.

Patrice Lecot : « Ramo » est le 10ème album de Tue-Loup, sorti en début d’année. Ca faisait un moment que vous n’aviez rien enregistré ?

Xavier Plumas : Ca fait 3 ans, c’est pas le bout du monde... Mark Hollis mettait 10 ans entre chacun de ses diques ! C’est surtout que personnellement, j’ai d’autres projets aussi. Après l’album « 9 » de Tue-Loup, j’ai sorti un album sous mon nom (« Le cabinet vaudou des curiostiés d’Adèle »). Je n’ai pas l’impression d’être dans une forme d’attente parce que j’essaie de sortir un disque tous les 1 ans et demi -2 ans...Si les structures et le contexte étaient plus favorables j’en sortirai un tous les ans, c’est faisable. Après ce n’est pas non plus une compétition, je n’ai pas envie de courir après Murat pour savoir qui va être le plus rapide à sortir le prochain disque...la quantité n’est pas gage de qualité, il faut que les choses prennent le temps de se faire.

Patrice Lecot : Pour « Ramo », j’ai lu que certaines chansons sont nées à Lisbonne. Tu as besoin de voyager pour trouver une inspiration suivant les lieux dans lesquels tu te trouves ?

Xavier Plumas : Oui, mais je ne suis pas allé à Lisbonne dans l’optique d’écrire un disque. Il se trouve que les premières chansons qui sont sur le disque ont été composées là-bas, en effet. Il ne s’agit pas forcément de voyager loin mais c’est surtout sortir de soi. Je suis convaincu de ça. Il faut faire en sorte de s’oublier soi-même sinon ça devient nombriliste et délétère ce qui peut nous tourner dans la tête. Je dis ça parce que j’ai des enfants, je les regarde grandir avec leurs amis et je trouve – sans vouloir avoir l’air d’un vieux con - que les générations qui viennent derrière nous ont du mal à sortir d’eux-mêmes. Ils sont extrêmement sur eux, ça ne génère pas grand chose de bon pour le collectif et le « vivre ensemble ». C’est des choses auxquelles j’essaye de faire attention et qui me posent question, en tout cas en ce moment.

Patrice Lecot : Ca pose question à beaucoup car le monde d’auourd’hui c’est pas rigolo.

Xavier Plumas : Non pas trop. Justement, je trouve que participer à ce genre de projet c’est bien, il en faut un maximum. Pas nécessairement dans la musique. Il faut que les gens continuent à avoir envie de se rassembler réellement physiquement. Je pense que les réseaux sociaux ont sûrement plein d’intérêts mais ça a la limite de ne pas se confronter au gens, or on n’est pas les mêmes par écrit ou devant quelqu’un qu’on a réellement en face de soi : on ne dit pas la même chose, on ne réagit pas pareil. Tout ce qu’on dégage physiquement c’est essentiel dans les relations humaines et ça serait bien qu’on n’oublie pas ça !

Interview réalisée par Patrice LECOT au festival des Rockomotives à Vendôme le 27/10/2016

Photos : Jérôme Sevrette

Retrouvez l’intégralité des photos et l’ensemble des travaux de Jérôme sur son site :

www.photographique.fr

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