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  • 29 octobre 2021 /
    Tardis
    Le titre par titre de Never Grow Up

    réalisée par gdo

01. 1986 [ATOMIC KIDS]

Une chanson qui parle de ce que c’était que d’être un gosse dans les années 80s, à regarder les Goonies et les Gremlins tout en ayant peur du nucléaire, à jouer à Operation (Docteur Maboul) ou Battleship (La Bataille Navale) tout en pensant qu’il n’y avait aucun futur à venir… Le titre fait référence à la catastrophe de Tchernobyl et à l’idée que la peur du nucléaire est vraiment ce qui définissait les gamins atomiques de la Génération X.

Musicalement c’est le versant rock / grunge de Tardis avec des grattes saturées et des larsens mais sans oublier quelques synthés aux accents 80s et un sample de l’annonce officielle du gouvernement anglais en cas d’attaque nucléaire sur le pays.

atomic girls, atomic boys, with your Nintendo on, you are never alone

02. NO ALIBI

No Alibi est une chanson qui parle de l’orientation sexuelle et du fait que personne ne devrait pouvoir nous casser les pieds avec ça ou critiquer telle ou telle orientation. Ce n’est pas la première chanson que j’écris sur le sujet et je pense que j’ai profondément été choqué en 2013 par les gens qui manifestaient dans la rue contre le mariage pour tous. C’est quand même rare de voir des gens manifester non pas pour leurs droits mais contre les droits des autres… et ça témoigne clairement d’une empathie zéro. Musicalement c’est un peu une tentative de chanson punk au ukulélé (du punkulélé ?) comme un chant de manif qu’on pourrait jouer et crier sans aucun remord à la gueule de ces idiots insensibles.

this is where we live, this is where we die, this is all that we got so we make love and we don’t need any alib i

03. MAD MEN IN BOXES

Une chanson à propos de la tendance qu’ont les gens et les institutions à tout vouloir étiqueter ou labelliser, à mettre un nom sur toute chose et sur tout le monde. On doit tous rentrer dans des cases et il n’y a pas vraiment de place pour la folie et/ou l’erreur. Il faut se conformer à la norme sous peine d’être rejetés. Les ”fous mis dans des boîtes” du titre font aussi référence au Doctor Who parfois décrit comme un ”mad man in a blue box”. Comme l’ensemble de l’album qui empreinte à mes yeux pas mal en termes de production au travail de Butch Vig avec les Smashing Pumpkins, cette chanson est un petit clin d’œil à la bande à Billy Corgan.

we wanna live like crazy, we wanna live for error, for error and error

04. AT THE ARCADE

Même si c’est le cas de tout l’album c’est cette chanson qui aborde le plus le thème du titre : ‘Never Grow Up’. Elle prend le point de vue d’un gamin qui se demande ce qu’il se passe lorsque les gens grandissent. Pourquoi la plupart des adultes ressemblent-ils à des zombies sur le trajet du boulot et pourquoi ils ne semblent plus s’enthousiasmer pour quoi que ce soit ? Après une nuit passée à la salle d’arcade, il pose ces questions à son meilleur ami via talkie-walkie. Il s’agit d’une balade basée sur 4 accords de ukulélé et avec un petit côté Girls in Hawaii période ‘Plan Your Escape’ pour le xylophone et une outro en 8bit.

they are all work and no play, dead at 30, buried at 70

05. ISOLATION TANK

Une chanson inspirée par les caissons d’isolation utilisés dans les expériences de privation sensorielle (ou dans ‘Fringe’ et ‘Stranger Things’ !) parce que je pense qu’on a toutes et tous parfois envie de nous couper de tout le bruit ambiant et de tout ce qu’on a clairement foutu en l’air dans ce monde… La chanson commence par des accords de piano étouffés censés évoquer le caisson et qui prennent de plus en plus d’espace sonore au fur et à mesure de l’arrivée des autres instruments et avant une explosion quasi-cosmique en fin de chanson. C’est sûrement la chanson qu’on préfère jouer tous ensemble en live ou en répète, il y a une sorte d’effet instantané de communion de groupe sur cette fameuse fin.

please put me under for a thousand hours, let me float and drift to another earth, to another world, where we didn’t do what we did

06. 10 FRAMES PER SECOND

Tout va si vite de nos jours, on dirait qu’on n’a jamais le temps pour de vraies conversations ou pour la contemplation. Le temps avance trop vite et pourtant on garde tous les mêmes photos de profils pendant des années sur les réseaux. Le temps avance et nous on donne l’impression de ne plus vieillir…

On aurait pu proposer une chanson lente pour contrecarrer cet effet mais je voulais justement qu’on sente l’urgence incessante de la situation dans la chanson elle-même (qui a un côté assez punk) et le titre fait ironiquement référence aux nombres d’images par seconde qu’on utiliserait pour créer une séquence en slow motion.

emojis are not emotions, there’re way too many frames per second

07. VIDEO NASTIES

La chanson fait référence au début des années 80s lorsque le gouvernement anglais a censuré, interdit et/ou détruit de nombreux films d’exploitation et d’horreur qui sortaient en VHS sous prétexte qu’ils étaient trop violents ou dangereux pour la communauté et qui étaient surnommés ‘video nasties’ (dont des chefs d’œuvre tels que Dawn of the Dead de Romero, The Thing de John Carpenter, The Evil Dead de Sam Raimi, The Texas Chain Saw Massacre de Tobe Hooper, Possession de Zulawski, etc.). Ce que j’aime dans cette histoire et ce dont la chanson parle, c’est le fait que très vite les gens ont contourné le problème en se passant des VHS pirates sous le manteau (comme les russes qui gravaient des vinyles US/UK interdits sur des radiographies pendant la Guerre Froide). C’est aussi notre première chanson où Julie, notre bassiste, assure les lead vocals.

censor, you’re out of your mind, censor, you’re way outta time, we’re watching nasties tonight

08. RAGLE GUMM

Une chanson directement inspirée d’un livre de Philip K. Dick : ”Time Out of Joint”. Ragle Gumm est le nom du perso principal qui, tel un prisonnier de la caverne de Platon et dans la plus pure tradition de Dick, se met à douter du monde qui l’entoure. Toute l’œuvre de PKD sous-tend cette idée qu’on n’est jamais sûr de rien, que notre compréhension du monde est toujours limitée et cette chanson essaie d’y rendre hommage. Il y avait aussi un aspect politique à cette position dans les 50s/60s : si on ne comprend le monde qu’à moitié, peut-être que les américains se plantaient sur la direction capitaliste prise par le pays ou sur leur façon de traiter les Afro-Américains par ex. Les paroles essaient de rendre hommage à cela aussi avec une petite phrase sur l’immigration.

Et la chanson joue aussi avec cette idée d’incertitude musicalement parlant avec une basse en ternaire sur un riff binaire, des refrains deux fois plus rapides que les couplets, des transitions et une fin un peu inattendues et une structure (censée être) originale.

one happy world, all around, where no migration is allowed, tell me : where will we all go ? where will we all go ?

09. JOE AND THE BUTTON FACTORY

La chanson s’inspire d’un chant traditionnel scout : ‘Hi, My Name is Joe’ où on demande à Joe / l’auditeur de pousser des buttons avec ses doigts, ses pieds et sa tête. Dans notre version Joe se fait licencier de la fabrique de boutons, se met à boire, finit en prison à cause d’une bagarre dans un bar et envisage de mettre fin à ses jours. Un peu dans la tradition ‘heartland rock’ de Bruce Springsteen en racontant une histoire plus réaliste liée au chômage et à la désillusion face à l’American Dream et avec des paroles assez brutes. Il y a une petite guitare qui fait très John Frusciante aussi.

everyday I’m getting closer to pulling the trigger and doing myself in, but that’s one button I can’t bring myself to push so instead I drink

10. FRENCH MOVIES ARE CINEMATIC GUANO

J’adore le cinéma, je vis au rythme de certains films et certaines séries depuis que je suis gosse. Je donne des cours sur le cinéma à la fac et je participe même à un podcast ciné à mes heures perdues. Mais le cinéma français moderne est souvent prétentieux et la France produit quand même un nombre incalculable de films totalement idiots… alors lorsque le festival de Cannes s’en est pris à Joon-Ho Bong et son film Okja en 2017, je me suis dit qu’ils méritaient une ‘jolie’ petite chanson. ;-)

C’est une de nos chansons les plus rapides et les plus rentre-dedans vu l’état dans lequel j’étais lorsque je l’ai écrite et toutes les chansons rapides, courtes et ‘heavy’ que j’écris doivent toujours un peu à ‘Song 2’ de Blur.

we reach another low, yeah every decade or so, we’re even blaming Joon-ho, when his films are pure gold

11. IGNATIUS

Ignatius fonctionne de prime abord comme une chanson d’amour (”talk to me”, ”if I changed now would you love me ?”, etc.) avant qu’on se rende compte qu’il s’agit d’une chanson qui parle de la difficulté actuelle de débattre, d’avoir un discours contraire au discours policé et instagramé des réseaux, comme si on avait soudain peur de ne plus être d’accord avec la masse, comme si on avait peur des mots. Alors qu’ils sont la matière première pour changer le monde : ”change the world with words”. La chanson s’inspire de ma lecture de White de Bret Easton Ellis et de ma rencontre avec cet auteur lors d’une conférence. Le titre ‘Ignatius’ est le surnom virtuel / l’avatar d’une amie (qui était aussi présente à la conférence) et qui signifie littéralement celui – ou celle – qui met le feu aux poudres, donc ça paraissait plus qu’approprié.

Consciemment ou non je pense que c’est le lien avec Ellis qui a fait évoluer la chanson vers un truc quasi ‘new wave’ (ses romans se passent en grande partie dans les 80s) avec cette basse très Joy Division et une voix (aussi) grave (qu’humainement possible pour moi) avant de basculer vers un truc plus rock / grunge.

this bland network is like a cage, the machine wants silence but we won’t give

12. NEW GODS, NEW STIGMATA

Nos nouveaux dieux (la technologie, les célébrités, les marques, les produits de luxe, les vacances au soleil) engendrent forcément de nouveaux stigmates : les téléphones rivés dans nos mains qui remplacent les plaies de la crucifixion, les 4000 noms de célébrités qui encombrent nos cerveaux (le véritable nombre qu’une personne emmagasine en moyenne), les tatouages de logos de marques sur nos peaux, les marques de bronzage cancéreuses, etc. et tout le monde prie tous les jours…

Musicalement la chanson doit sûrement beaucoup au groupe australien Sticky Fingers et à leur capacité à faire évoluer 4 accords en utilisant toutes les techniques de jeu possible (finger picking, arpèges, accords pleins) et à superposer de plus en plus d’instruments successifs sur le même riff (guitare 1, guitare 2, guitare 3, basse, piano, synthé, samples, voix, etc.) vers un final qui est censé évoquer la transe.

oh how I miss my brain : another day, another stigma in the database



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