Quand je vois la facilité avec laquelle nous pouvons voir, écouter le moindre groupe norvégien qui fait du blues en jouant sur des cordes tissées avec les viscères d’un élan braconné, j’ai toujours une forme de nostalgie de l’époque où l’on veillait tard dans la nuit du dimanche au lundi, pour regarder Rock Express, se délectant des reportages présentés par Laurence Romance, nous permettant de mettre des visages, et surtout de voir les corps en mouvement, des musiciens que Bernard Lenoir nous présentait dans la semaine.
Comme il fallait se lever tôt, j’enregistrais l’émission, visionnant l’émission le lendemain, et archivant grâce à un deuxième magnétoscope certains reportages (la section hard rock n’avait aucune chance de subir ne serait ce qu’un visionnage). J’ai donc toujours eu une tendresse pour ce format, la VHS, ses lignes qui donnaient déjà des allures vintage à quelque chose. Cela s’apparente encore maintenant à une époque bénie, celle de la recherche d’information avec les moyens de l’époque, les yeux brillants de la découverte rare (est-ce encore possible à l’heure actuelle) et celle de l’apogée de l’indie music, avant sa dissolution dans la machine à fric.
Si je vous parle de tout cela en préambule de la chronique de Tardis, c’est que l’album du groupe concentre toute cette époque, que ce soit via la pochette de l’album, avec le nom du groupe (bon je vais faire mon malin, mais merci la recherche facile de notre époque qui m’a permis d’apprendre que Tardis était une machine à remonter dans le temps dans la série Docteur Who, acronyme de Time and Relative Dimension(s) in Space), et donc avec la musique. Car le groupe, s’il n’a pas la prétention d’être à la pointe d’un revival qu’il enclencherait (d’ailleurs le groupe a tout sauf de la prétention) a le vrai talent de convoqué le passé avec la gourmandise d’un gardien de musée qui jouerait le monsieur loyal le temps d’un soir.
Le groupe n’invente certes rien, mais dégage quelque chose de bluffant, nous mettant sur des pistes qui peuvent nous paraitre balisées. Mais Tardis est un disque amoureux, un précis inspiré et inspirant, parfaite Madeleine de Proust quand nous recherchons le Nord, dépourvu d’une boussole que nous avons fini par détruire à trop la questionner. Tardis serait comme le gardien d’un phare qui nous servirait de guide quand nous nous sommes trop perdus à chercher l’inédit de peur de nous couler sous la mer de la mélancolie du c’était mieux avant. Tardis c’est très bien, et c’est maintenant.