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Avec son premier album, l’impeccable « Songs From la Chambre », Julien Bouchard aurait pu avoir tout dit, c’est souvent ce qui fait que le second album d’un artiste est souvent moins bon. Mais comme je le disais pour la chronique de celui-ci, Julien a dans le regard une forme de malice, comme si sous cette forme de nonchalance et douceur se cachait un songwriter qui aurait un coup d’avance.

Mais ce serait mal connaître l’auteur-compositeur interprète, chez qui la peau semble être son moteur principal, quand celle-ci gagne son épithète botanique. En jouant avec les langues dans le titre de son premier album, Julien, bercé par la pop anglo-saxonne, ne pouvait imaginer un jour enregistrer un album totalement en français, même si les premières excursions étaient déjà plus que prometteuses.

Fin de la musique dans la chambre, laissons rentrer l’oxygène et quoi de mieux que se baigner dans les forêts vosgiennes (amour que je partage avec lui) qui sèment le trouble dans les esprits excités, et qui apaisent et réconfortent les esprits mélancoliques et posés, ou quand le fait d’aspiré donne de l’aspiration.

Cette collection de chansons (elles sont dix) a donc pour nom l’étonnant titre de « Excuse my French » ( Fuck, un groupe américain que je dois être le seul à connaître avait sorti un album du nom de « Pardon my French » ). Car si l’environnement est familier, l’écriture en français n’était pas une évidence. Mais à l’instar de J.P. Nataf qui lui ne pouvait jurer que par XTC par exemple, Julien a repris sa langue natale avec peut-être la même appréhension que le dresseur devant débourrer un cheval, mais la même envie d’en découdre, pour un résultat qui pourrait dépasser ses propres espérances.

Pas si innocent que cela (Château de Sable) mais une véritable appétence pour la mélodie solaire portant des textes ou l’intime se donne via une voix qui à l’instar d’Elliott Smith ne force jamais son destin. Diluant ses fins de phrase comme la fin d’une caresse (Ton Ombre et ma Lumière) électrisant notre épiderme, faisant du frisson un des ingrédients de la phase de séduction. Car ce disque est une véritable parade séductrice, mais Julien préfère troquer les gros sabots pour des pas presque nues, tout juste habillés d’un lainage doux et chaud.

Mais ne me parlez pas d’austérité, car si Julien ne voit pas les choses en grands, sauf quand il sculpte les sommets de la fenêtre de son home studio, il emmène ses chansons sur un terrain joliment âpreté (Même Pas Là) ou accidenté (Tu m’entraînes) car le background musical est là pour porter cet édifice certes solide, mais qui pouvait s’effondrer sans des fondations.

Combinant tout cela, Julien réalise un deuxième (il y aura une suite évidente.) album épatant, au charme éclatant. Songwriter est un mot anglais, mais il colle parfaitement à Julien. Excuse my review.