Interview réalisée par mail le 05 Octobre 2005.
Brad pourrais tu nous expliquer la différence entre Foxglove et Digitalis ?
— La différence principale entre les deux labels, est qu’avec Digitalis j’essaye de sortir des disques à plus grande échelle qu’avec Foxglove. Mais c’est en train de changer petit à petit, avec certains projets. Je vais sûrement utiliser Digitalis pour sortir des disques dans un emballage plus traditionnel (boite en plastique etc), alors que sur Foxglove on va essayer de continuer à faire les pochettes à la main. Foxglove continuera à sortir des CDR, même si quelques sorties sur CD classiques sont prévues. Digitalis a commencé en mai 2003 et Foxglove peut être six ou sept mois plus tard (ndlr : depuis il y a eu 90 disques sortis sur Foxglove et une quinzaine sur Digitalis).
Comment fonctionnes tu pour choisir les artistes que tu as envie de promouvoir ?
— Evidemment le premier critère est que la musique me plaise et que je sente qu’elle puisse plaire à d’autres personnes. Après la seule restriction que je peux appliquer, est que je souhaite que le disque me fasse évoluer, m’emmène là où je n’avais jamais été. Ensuite peu importe qu’un disque soit expérimental ou non, ce n’est pas ça qui fait la différence. Mais sincèrement mon principal critère de choix est, est-ce que ce disque me fait avancer. Si oui alors j’ai très envie de le publier.
La plupart des groupes présents sur Digitalis/Foxglove sont tous très productifs. Ne crois tu pas que des fois cela peut être un problème ?
— Si, je pense que ça peut être un problème, mais d’un autre côté c’est une très bonne chose. Ca dépend de beaucoup de choses. On se plaint quand un artiste n’a pas sorti de disques depuis deux ans et on se plaint aussi quand on sort deux disques par an. Donc bon tu ne peux pas satisfaire tout le monde, et je pense que chacun doit faire comme bon lui semble. Pour ma part j’aime que mes groupes préférés sortent beaucoup de disques, car j’ai toujours quelque chose de neuf à écouter. En même temps je n’essaye pas d’avoir tout ce qui sort, ça serait vraiment trop compliqué. Je crois que chacun doit se fixer ses propres limites.
Chaque sortie, sur Foxglove, est limitée à une centaine d’exemplaire, voire moins. Pourquoi si peu ?
— En fait on limite le nombre de copies pour plusieurs raisons. Evidemment le côté financier rentre en jeu, mais surtout c’est énormément de travail de sortir un disque. Cela prend beaucoup de temps et faire de plus gros volume serait vraiment contre productif. Sortir 100 exemplaires était une très bonne chose, en même temps si on continue à avoir autant d’intérêt pour la musique qu’on distribue via les labels, il faudra sûrement que j’en fasse plus. Mais on verra je laisse les choses venir. Pour l’instant le dieu de la musique étrange m’a été plutôt favorable, donc on va continuer comme ça.
Je crois que tu es tombé amoureux de la Finlande.
— J’ai effectivement beaucoup d’amis là bas. Ils sont brillants, extraordinaires. Et puis ils font aussi ma musique préférée. Donc oui j’ai de réelles affinités avec la Finlande. Je me suis rendu à Helsinki il y a quelques années et je suis tombé amoureux de la ville.
Tu gères beaucoup de choses à la fois, tes labels, tes groupes, ton webzine, ton blog. La passion suffit elle ?
— J’adore la musique plus que tout au monde (après ma femme). Et depuis que c’est plus ou moins mon travail à plein temps, j’ai beaucoup de temps à lui consacrer. Je suis extrêmement occupé, mais je ne ressens jamais cela comme du travail. Je me sens comme dans un genre de rêve.
Peux tu nous parler un peu plus de cette immense compilation " Gold leaf branches " ?
— Ah, j’ai eu pas mal de problèmes (le dernier en date fut un problème au moment de presser le disque, mais je m’en suis sorti), mais en même ce fut un énorme plaisir. " Gold leaf branches " est une compilation contenant trois cds et 59 morceaux d’artistes que j’adore et que je connais pour la plupart. C’est une compile avec deux buts principaux, rassembler en un seul endroit toute la musique que j’aime venue des quatre coins du globe, et en même temps donné une exposition un peu plus grande à beaucoup d’artistes bien moins connus, mais tout aussi ahurissants. Je crois que ça a plutôt bien fonctionné, car tous les artistes semblent adorer cette compilation. Mais rassembler tous ces groupes m’a pris énormément de temps en appel téléphonique, email et autres messages instantanés. Je devais définir qui serait sur la compile et en même temps leur rappeler de m’envoyer leur morceau. Ce fut long et compliqué, mais je pense que cela paiera quand les gens auront ce bel objet entre leurs mains.
Il y a désormais beaucoup de labels dans la même veine que Digitalis/Foxglove. Tu as des relations avec certains d’entre eux ?
— Je pense que chaque personne impliqué dans ce type de musique connaît, ou est au courant au moins de ce que chacun fait. Je me sens très proche de beaucoup de labels effectivement, Jewelled Antler, Last Visible Dog et surtout Pseudoarcana, 267 Lattajjaa, et MusicYourMindWillLoveYou (nous très amis avec Michael). Je pense que toutes les personnes derriere ces labels ont le même but, à savoir de répandre cette musique va de l’avant et que nous aimons plus que tout. Il y a une franche camaraderie entre nous. Et puis cette amitié rend le travail plus agréable dans un label.
Parlons un peu de ta musique. Tu sembles avoir comme 1000 groupes.
— Attends je ne crois pas que ce soit 1000. Plutôt vers les 900 seulement. Je n’ai pas vraiment de secret, j’essaye de rester constamment occupé, de rechercher de nouvelles choses et de laisser mon esprit et mes idées vagabondés où bon leur semble. Plus je suis occupé, mieux je me sens.
Quelle est la part d’improvisation dans ta musique ? Aimes tu enregistrer à l’extérieur ?
— L’improvisation joue un rôle important dans ma musique. La plupart de mes compositions est un mélange entre des pièces composées et de l’improvisation. La liberté que t’apporte l’improvisation peut être à la fois vivifiante et rébarbative. Soit cela tourne très bien, soit cela peut s’avérer être une catastrophe et briser le morceau. Mais j’aime prendre ce risque, et en être conscient. Savoir qu’une seule mauvaise note peut ficher en l’air un morceau, c’est très excitant. Ca m’arrive d’enregistrer à l’extérieur. Dans ce cas Glenn Donaldson a sûrement été une inspiration, mais pour moi tout a commencé et s’est terminé avec les field recordings d’Alan Lomax.
Tu joues avec ta femme dans Corsican Paintbrush. L’amour est il un bon moyen de créer de la musique ?
— Tout à fait, surtout dans ce cas là. Eden et moi adorons faire de la musique pour Corsican Paintbrush. Quand nous l’avons commencé, c’était juste quelque chose pour nous, qui nous permettait de créer une musique rien que pour nous deux. C’était un hobby en quelque sorte. J’ai malgré tout décidé de sortir, en petite quantité, nos premiers enregistrements, et nous avons reçu des réactions si positives. C’était vraiment génial et cela nous a donné envie d’enregistrer encore plus. On espère même faire quelques concerts bientôt.
Comment arrives tu à savoir quelle idée va aller pour tel projet etc ? Et sors tu tout ce que tu enregistres ?
— Non je ne sors pas tout ce que j’enregistre. Peut être un petit peu plus que la moitié. Je ne sais pas trop, difficile à dire, mais j’ai beaucoup de morceaux qui ne sont pas finis ou qui ne sont pas bons. En ce qui concerne le choix d’une idée pour tel projet, c’est vraiment dur. Certains projets sont plus évidents que d’autres, par exemple pour Corsican Paintbrush ou Ajilvsga, parce qu’ils sont enregistrés en live avec un line up pré défini. Après c’est vraiment une histoire de sensations de savoir sur quel projet le morceau que je viens de créer ira. Beaucoup de ce que j’enregistre pour The North Sea est écrit, donc je passe pas mal de temps dessus. Du coup je sais que ce sera quelque chose qui va être travaillé et que je me dois de finir. Je n’ai pas vraiment de réponse concrète, parce que c’est une histoire de fluide. J’écris, joue et enregistre beaucoup, mais pas constamment. Ca vient par bribes.
Questions difficiles, quels sont tes futurs projets, pour les labels et pour toi-même ?
— Oh mon dieu, il y en a tellement. Pour ma propre musique, il y a quelques nouveaux The North Sea. " Underneathe The Jesus Tree " sortira en CD chez Music Fellowship et " Snakeroot Ceremony " sortia en CDR chez Audiboot. Audioboot sortira surement aussi mon prochain disque "In the time of the Sugar Pines" au début 2006. Corsican Paintbrush va sortir un split CDR avec Apple Snails sur Alamagator prochainement, et nous travaillons sur d’autres disques. Un disque de Alligator Crystal Moth (Michael Donnely de Brothers of the Occult Sisterhood et moi) sera co-realisé par MusicYourMindWillLoveYou et Foxglove, tandis que MYMWLY sortira des CDRs de Autumn Galaxy (moi et Ville Moskiitto), Ajilvsga, et Rura’pente (un groupe dans lequel je joue depuis longtemps). The Servant Sun (Peter Wright et moi) a terminé un album intitulé " Clodharbour " mais sans label aujourd’hui. Il va y avoir aussi une collaboration entre Rameses III et The North Sea qui sortira sur 267 Lattajja. Nick Hennies de The Weird Weeds et moi sortiront un ep sous le nom de Dog très bientôt. Et The Juniper Meadows et the Golden Oaks sortiront de nouvelles choses en 2006. Pour les labels, Digitalis va finalement sortir la compilation " Gold Leaf Branches, dans très peu de temps. Il y aura aussi prochainement les disques de James Blackshaw, Christina Carter and Gown et Kyrgyz. Sur Foxglove nous allons sortir un nouveau Brothers of Occult Sisterhood et un double cd de Sivester Anfand qui va sortir aussi chez Audioboot. Et puis ne ce qui concerne les sorties de CDR : Keijo and The Free Players, Cahier, Stuart Busby, Apple Snails et The Futurians.
Dernière question, qu’écoutes tu en ce moment ?
— Il y a beaucoup de bonnes choses actuellement. J’ai vraiment aimé le nouveau double cd de Omit chez Helen Scarsdale et les dernieres sorties de Terracid chez 267 Lattajja et MYMWLY. Asa irons " Swann Miller " est un des meilleurs disques de cette année et il a beaucoup tourné chez moi. J’aodre aussi le disque de The Clear Spots " Mountain Rock ". J’ai beaucoup écouté et apprécié The Band récemment et je suis assez impatient de découvrir le coffret qui va sortir bientôt.