Je regarde cette photo de lolita en blanc et noir, et ne voie que des couleurs. Il y a là une abeille si frêle qui enchante, de ces bêtes qui vous endorment joliment dans leurs vols et juste a l’orée du rêve, vous piquent, et toute votre vie, vous reconnaitrez cette saveur de l’aiguille. Quelque chose intangible derrière moi me murmure un nom, au dos de cette photo « Kate Bush ». Je m’effraye, j’ai des années de vie commune avec Kate, des feux de joie et des nuits intimes, je chasse l’intangible et l’idée de Kate (en superficie). Lolita est ce surnom qu’on donne a ces nymphes dorées, Amanda, n’est pas de ces Lolitas là, si ce n’est pour l’âge (17 ans, qu’est ce que je faisais, moi a 17 ans ?). Mais c’est là, présent, une femme, de celles qui savent rendre simple nos torsions mentales, qui savent déjà tout de la vie, leurs rayons de lumière, leurs rayons de lune, du bord de leurs mots si naturels, le long de leur rivière mélodiques. Il y a dans cet atlas géographique d’Amanda des eaux scintillantes de pianos, des montagnes tristes et des vallées chatoyantes, sa voix est ce ciel qui réchauffe les jours banals et leur donne couleur et vie.

Disque éponyme, c’est elle dans chaque son, elle tisse son portrait de nœuds en nœuds, un collier ou s’intercalent les perles marines et roches volcaniques, sachant effleurer chacune de ces matières. Elle est aussi somptueuse que ces écrins précieux de velours rouge, millimètre ses sonorités avec exquisité, et nous embrasse, capable de chevauchées de rythmes majestueux puisés dans chaque parcelle du monde (said and done), capable de reposer le guerrier vaincu d’une voix intime (Skinnarviksberget), capable d’un univers infini et sien (Doubt), Amanda y est Amanda, aucune Kate, personne d’autre, guidée par ses lumières (et de bons compositeurs qui ont su être elle), elle laisse derrière ces 17 ans pour un futur de grandeurs et féeries. Une petite œuvre d’écoute luxueuse finement ciselée d’artisane passionnée.