Il y a des choses, des musiques qui ne s’imposent pas naturellement, laissant le chroniqueur que je suis dans l’expectative, dois je persévérer au risque de perdre du temps, ou dois je laisser définitivement ce disque. Pour ce « Home Storm » je sentais que le temps n’était pas perdu, il y a dans ce style de musique quelque chose qui nous taquine, une petite voix qui nous appelle (comme sur les disques de The National par exemple) nous suggérant que le plaisir est là, il faut juste le mériter.
« Home Storm » sait combiner la voix jouant avec le relief de Magdalena Bucher, nous rappelant à la fois la Bjork mutine (Tic Tac) qui ne jouait pas encore avec nos nerfs, et Kristin Hersh, préférant passer sous silence les vocalises parfois dérangeantes (comme sur « Light Over Innsmouth ») qui ne sont pas sans rappeler pour le coup les pires heures passées devant une émission de variété par la faute d’une torture sentimentale que l’on nomme la concession conjugale.
Avec cette voix élastique et joueuse, le groupe peut dés lors s’amuser, s’installer, s’éviter une structure facile (Puzzle of Feelings ) jouer avec la tension, s’accorder une liberté rare (Power That Bee) que l’on ne rencontre que rarement.
Les atmosphères sont alors multiples. « La Réalité » en français dans le texte, car j’oubliais le groupe chante aussi bien en anglais qu’en espagnol (En Guantes Blancos) et donc en français, pour « La Réalité » nous pensons tout à la fois à Mazzy Star et à Noir Désir quand Cantat trainait dans les traces laissées par un Léo Ferré si loin.
« Trainer Song » installe aussi cette atmosphère qu’Hope Sandoval aimait arpenter, mais ici la lumière est plus forte, ne se limitant pas à l’éclairage seul des voyants de sortie (spécial dédicace aux sessions de Lenoir). Et puis comme dans tout disque qui sait offrir une gamme solide, un titre doit sortir du lot, comme la cerise sur le gâteau. Ce rôle sera dévolu à « Blue Moon » l’orage, la tempête du disque, une rencontre entre un GYBE plus ramassé et une Patti Smith qui se rendrait compte qu’au bord du précipice la seule solution et de plonger en humant une dernière fois le l’air que le vent porte. Ce titre est épique dans ce que la mot à de plus fort, il dévaste tout sur son passage, avant de s’écraser comme une berceuse pour un sommeil définitif.
Disque multiple, expérience parfois limite du chant comme certains guitaristes peuvent nous gonfler avec des solos interminables, mais au final la sensation de croiser un groupe pas tout à fait comme les autres. Imposant.