Dans les couloirs du métropolitain, ces derniers jours, chaque matin, par l’intermédiaire d’affiches collées ici et là, je croise Pomme, son teint blafard et son costume de derviche tourneur qui ne tourne pas (ou plus). Elle porte sur la tête un énorme (et certainement pesant – Atlas, is that you ?) chapeau, du genre de ceux que Matthew Barney aurait pu concevoir pour Björk. Son visage est inexpressif et le titre de son troisième album, « Consolation », me fait l’effet d’une supplique muette à laquelle personne ne répondra. Calée entre les publicités pour des salles de sport et autres invitations à s’enrichir en pariant sur des matchs de football, sa présence incongrue et quasi spectrale est comme une respiration au milieu des innombrables injonctions débiles qui, d’un trajet l’autre, polluent mon champ visuel.

Une chronique du dernier opus de Claire Pommet dans ADA, je reconnais que c’est incongru. J’ai pris le parti d’écouter ce disque en imaginant que je ne savais rien d’elle et je vous le donne en mille : aucun coup de griffe ne lacérera « Consolation ». Sur des instrumentations minimalistes, inventives et pertinentes, le chant délicat énumère du bout des lèvres les états d’âme d’une artiste que l’on devine apaisée – elle a percé dans le game – et néanmoins intranquille – rien n’a changé, les névroses sont toujours là, tapies dans l’ombre, prêtes à surgir. Bardée de prix et de critiques élogieuses, elle poursuit son chemin sans se soucier d’écrire le genre de chansons faciles qui feraient d’elle plus que ce qu’elle est actuellement, une excellente musicienne. Pomme ne se rêve pas autre, elle me fait penser à la Alma Forrer des débuts, avec une pointe de Coco Rosie, entre délicatesse acoustique, sincérité à fleur de peau, diction précise et arrangements sans esbroufe. Si « Consolation » était le premier album (très mélancolique) d’une parfaite inconnue, les blogs underground et leurs papys pop qui se gargarisent de sentir le vent tourner avant tout le monde se jetteraient dessus pour en faire leur nouvelle égérie.