Interview réalisée en août 2004.
Rencontre avec Anthony Roman (chanteur et bassiste) et Gerard Garone (synthé), deux heures avant leur montée sur scène. Même s’ils tournent depuis 1999 et qu’ils font un détour pas Rock en Seine entre Reading et Leeds, on sent le groupe un peu tendu. " C’est la première fois que nous sommes si haut sur l’affiche et sur la scène principale. D’habitude dans les festivals nous jouons sur les petites scènes. Ici c’est super de pouvoir jouer devant autant de monde ".
La musique et l’attitude de Radio 4 ressemble beaucoup à celle des Clash. Pas étonnant car ils représentent ce que les Anglais ont découvert à New York :un mélange de sons, rocks, reggae, dance, hip hop et un style très urbain. Limiter les Radio 4 à leur parenté musicale avec les Clash serait injuste d’autant plus qu’ils ont tout fait " avant ". Ils se sont intéressés aux Clash avant la mort de Strummer, ils ont fait du rock avant les Strokes ou Interpol, ils ont adopté une attitude politique avant les frasques de George W et ils étaient New Yorkais avant le 11 septembre. On peut même pousser jusqu’à dire qu’ils venaient de Brooklyn avant les Yeah Yeah Yeahs et TV on The Radio.
Ils ont donc fait beaucoup de choses avant les autres, mais peut être trop tôt aussi car ils n’ont pas autant bénéficié de la hype New York que d’autres groupes plus récents. Pour preuve, lors de leur prestation à Rock en Seine beaucoup ont découvert qu’ils connaissaient en fait Radio 4, ils avaient juste oublié de mettre un nom sur le groupe auteur de la musique pour la publicité Coca Cola Light (l’excellent Dance to the Underground).
Comme leurs voisins d’Interpol, ils ne se sentent pas très proche du reste de la scène New Yorkaise. " Nous adorons cette ville mais c’est un mythe. C’est juste une très, très grande ville, avec beaucoup de lieux pour jouer. C’est normal qu’il y ait beaucoup de groupes et que donc il y en ait des bons. Ca ne rend pas les choses faciles pour autant, il faut du temps pour trouver son public. !!! (Chk Chk Chk) tournent là bas depuis six ou sept ans et ils viennent seulement de sortir leur première album, Interpol ont mis quatre ans à sortir leur premier album. Nous les avons vu démarrer. Au début il n’y avait que quarante personnes à leurs concerts et puis à chaque fois qu’ils jouaient, le public était plus nombreux. C’était la même chose pour nous. Il n’y a que pour TV on The Radio que ce soit allé très vite. Je crois qu’ils n’existent que depuis un an ou deux et ça marche déjà très bien pour eux. C’est notre groupe préféré en ce moment (NDLR : à moi aussi). "
Radio 4 est aujourd’hui à un tournant de sa carrière. Avec la sortie de leur troisième album, ils ont la possibilité de toucher un plus large public. D’autant plus que " Stealing of a Nation " recèle quelques tubes comme Transmission, Absolute Affirmation ou Party Crashers. Ce dernier est d’ailleurs entrer dans le Billboard Dance Chart aux Etats-Unis, à la 19° place, mais ça reste un exploit pour un artiste du circuit indépendant.
Avec un album qui s’appelle " le vol d’une nation " il est normal que nous parlions politique. Gerard : " George Bush va perdre les élections et ce sera le début d’autre chose même si Kerry n’est pas forcément la meilleure personne. Comme en Grande Bretagne où les travaillistes sont revenus au pouvoir mais on voit finalement le résultat. Quoiqu’il en soit un mec comme Bush c’est bon pour la musique, c’est bon pour le rock’n’roll. Il rend les gens en colère et il y a un vrai renouveau de la scène punk rock en ce moment. " ADA : Qu’avez vous pensé de Farenheit 9/11 de Michael Moore ? Anthony : Je ne l’ai pas vu. Gerard : Moi, je l’ai vu et je l’ai bien aimé. Je pense que c’est un bon film. Il y a beaucoup de choses que je savais déjà avant. Bien sûr il caricature parfois, mais il faut toujours exagérer un peu si vous voulez faire passer un message. De toute façon on ne peut pas se contenter de regarder la TV si on veut s’informer. Il faut aussi lire des livres et regarder sur internet.
Le groupe qui ne veut pas trop s’étendre sur le terrain politique accueille avec un peu trop d’enthousiasme la question suivante : " où est-ce que vous préférez jouer ? ". Radio 4, unanime : " La France est un pays où nous aimons bien jouer…. ". Mais, on ne la fait pas, je tente un coup de bluff : " Vous avez dit la même chose en Allemagne ! ". Anthony reste quoi, Gerard explose de rire. " Bon OK, mais c’est quand même vrai que nous avons un bon accueil en France. Les gens sont supers avec nous. En plus Labels fait un super boulot pour nous ici. Ils ont beaucoup d’énergies et beaucoup d’idées. C’est ça le plus important pour promouvoir un disque plutôt qu’un paquet de dollars. "
A propos Anthony, il y a quelques années tu as ouvert un disquaire à Brooklyn. Penses-tu, qu’avec la crise que semble traverser l’industrie du disque, ce soit toujours une bonne idée d’en ouvrir un aujourd’hui ?
— Oui bien sûr. Il y a déjà tous ces gens qui veulent encore des vinyles. Et puis je crois qu’il y en a qui aiment acheter des disques, ils aiment les toucher, les ouvrir, découvrir le livret... Pour l’indé, je pense même que l’internet est un bon soutien car on peut écouter et découvrir les disques avant de les payer 15 ou 20 dollars. Je crois que le MP3 a surtout fait du tord aux majors.
Vous avez beaucoup tourné, où sont les meilleurs disquaires ?
— Il y en a partout où nous avons joué. A Londres il y en a des très bons. C’est la ville où nous restons le plus donc nous avons aussi eu plus de temps pour l’explorer.
Les Anglais font un petit complexe en ce moment face à tous ces groupes New Yorkais. Que pensez-vous de la scène actuelle en Grande Bretagne ?
— Franz Ferdinand et The Streets sont des fiertés nationales et les Libertines aussi. Quand vous allez à Londres tout le monde ne parle que de Pete Doherty et des Libertines, c’est un peu ridicule. En revanche il y a un groupe que nous aimons beaucoup, les Futureheads.
Et bien moi il y a un groupe que j’aime beaucoup en ce moment ce sont les Radio 4, courrez découvrir Stealing of Nation ! .