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En attendant le prochain Aline, le nouvel EP d’Accident risque de longtemps squatter notre espace musique – et, dans une autre époque, toutes les radios de France. Car si le cousinage Romain Guerret y est aussi légitime qu’explicite, le duo formé par Laurent Maudoux et Jérémy Monteiro s’offre un « dernier voyage » qui, à l’instar des bizarreries pop d’Aline, ressemble à une création diabolique. Affaire de famille, semble-t-il.

Groupe Frankenstein : Field Mice, Turboust, Taxi Girl, Dominik Nicolas, Daft, Tellier ou Felt s’assemblent, se trouvent des correspondances, mais finissent par donner corps, bien vivant, à ce genre d’OVNI qui manque aujourd’hui à la France des chanteurs et chanteuses Bisounours.

C’est quoi ça !? De la synth-pop qui tuerait les 80’s pour mieux balancer quelques pics vachards à l’encontre de l’année 2019 ? Une musique qui s’insinuerait chez les geeks afin de mieux se foutre de leurs gueules ? Cette idée que les revivals posséderaient légitimité à seule condition d’en briser l’ossature initiale ? Qu’il est souhaité de faire du neuf avec du vintage ? Donald Pierre sous acide, persuadé que Sensitive est un cousin proche de Such a Shame ? Indochine devient soudainement un groupe théorique ?

Accident ne dévie pas de son éthique originelle. Mais la paire, avec l’assurance des années, ose maintenant tous les coups, tous les risques, des choses impensables, des trucs aberrants, des partis pris qui détonnent et qui fonctionnent. Les Tarantino de la pop française ? Pourquoi pas ? Car Dernier voyage s’inscrit dans le « il était une fois ». Et de même que l’auteur de Reservoir Dogs ne cesse de modifier les genres cinématographiques qu’il idolâtre, de même Accident propose sa vision très personnelle de la new wave et de la pop. Le « Il était une fois » permet donc au groupe de réécrire l’histoire de la synth-wave, et de lui offrir une voie alternative – tout comme Tarantino, avec Inglourious Basterds, changeait, avec culot, les dernières heures de La Seconde Guerre mondiale.

Une new wave qui s’appréhende selon le contemporain, et pas du tout en fonction des souvenirs ados. Déjà vu déjà fait, comme le proclament, non sans humour, Jérémy et Laurent ? Oui, mais pas comme ceci : en travers de la route, sur le gravier, en plein danger.