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La position de l’artiste face au monde, à l’avancée de celui-ci vers ce qui le rend de plus imprévisible, à l’actualité, n’est pas facile. Soit il en vient à se transformer en rédacteur en chef et présentateur d’un journal télévisé où chacune des chansons seraient un sujet de celui ci, soit il désintègre l’idée même d’art faisant dans le réalisme primaire, à finir dans la rubrique des chiens écrasés d’un journal régional. Et puis il y a la version plus « poétique » plus hermétique à l’instant, se munissant de chausse-trappe afin d’y faire tomber l’ensemble des poncifs.

Le monde, ce qu’il représente est alors traduit, sa brutalité évidente transcrite sur une portée, sa tension de plus en plus palpable couchée sur une partition entière, infligeant au papier des blessures. Mnemotechnic est de cette obédience. Depuis 10 ans les Bretons (ils arrivent de Brest et de Rennes) ne distillent pas une musique, ne s’embarrassant pas d’une maturation, le ver ayant depuis trop longtemps pourrit nos vies pour que le temps soit une variable d’ajustement pour reprendre la nouvelle sémantique guerrière des cols blancs à cravate. Mnemotechnic va droit au but et semble sédimenter autour de nous ce qui pourrait devenir une barrière de protection salvatrice. Ce mur sonore certes massif, se laisse recouvrir d’un drapé animé, une fresque retraçant de façon divinatoire la lutte que nous allons devoir mener pour écraser la tour de Babel que la diabolique machine interne de notre monde contemporain semble vouloir construire sans penser à la dernière pierre, et ce dés l’introductif « Alpinist » pendant lequel le groupe plante un drapeau d’espoir en haut de l’ignominie, décuplant l’énergie pas si sauvage pour la déposséder de son pouvoir.

Le constat n’est pas amer, il serait presque le carburant (Leak the Civilians) d’une contestation de tous les instants quitte à y laisser des forces, pliant sans ne jamais rompre. Trop carré, presque géométrique pour être animale, la noisy rock de Mnemotechnic est un précis de notre propre décomposition, arrachant les derniers lambeaux de peau de nos espérances, avec une forme de rage dénuée de la moindre once de sadisme. Si on sent un possible cousinage avec des groupes comme Patton ou Sonic Youth, surtout dans l’installation des titres, l’univers de Mnemotechnic serait plus à rapprocher du cinéma de fin du monde dans les méandres du Berlin de Wenders, s’enfermant dans des théâtres aux sièges en velours comme dernier lieu pour jouer la dernière pièce d’une humanité en perdition. Les voyants de Mnemotechnic sont rouges.




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