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« Dis, je t’en prie, n’aie pas peur ». Ben non, ça ne fait pas forcément peur, des Français qui jouent de la country, qui manient la basse comme des punks, qui savent jouer de la guitare, ni qui chantent comme Christophe Miossec.

Ce qui marque une différence importante entre les genres pré-cités et le gang d’ Hyperrêve (projet porté par Samuel Lequette, dont ce premier album sort aujourd’hui) c’est peut-être l’universalité des sujets qui traverse les textes, derrière certaines mélodies dont les crescendos nous interpellent : « il n’y a pas de temps à perdre ». Pas faux, mais…

Étrangement, se rappelle à mon souvenir la déferlante Louise Attaque, parallèle à celle de Sixteen Horsepower. De mon point de vue (les deux claques ont été prises en même temps, vers 1997, voilà pourquoi) : impossible de les déconnecter l’une de l’autre. On découvrait (certains étudiants en art rouennais dansaient alors sur du Steeple Remove plutôt que sur du Tahiti 80), on découvrait que certains groupes exaltés pouvaient jouer du bandonéon, du banjo, du violon, chanter en français, nous faire aimer des types comme Hank Williams Ier, Hank Williams Junior et Hank Williams the 3rd ET rester cool (plus snob qu’un étudiant des Beaux-Arts, tu meurs). On avait la rage, on dansait comme des dingues, on lisait les premiers Houellebecq. C’était vital. I Am Kloot - vous allez voir où je veux en venir dans deux lignes - débarquait - on était en 2000 - ROB nous faisait vibrer - merci Burgalat - et The Bees, et Ladytron, et Burgalat, etc…

Donc, quand Hyperrêve sort ces jours-ci, on veut soupirer de soulagement car non, il n’est point ringard de chanter des paroles traduisant un certain engagement politique dans des luttes importantes (la présence vitale d’une terre que nous foulons, d’arbres qui nous procurent ombre et fraîcheur, entre autres bienfaits gratis et néanmoins méprisés). Et puis, cette chanson française-là n’est pas auto-centrée (on n’est pas contre l’introspection, mais de temps en temps il faut bien respirer hors de sa bulle, hein). 

Seulement ces « Absences Futures » manquent un peu de pêche, et mon petit doigt me souffle la raison de ce manque, bien présent pour le coup. Le chanté-parlé mollasson des sieurs Damasio et Lequette (chanté ou dé-sans-chanté ?) aurait pu laisser (eh ouais, je vais faire ma chieuse, pas envie d’être sympa, les sujets invoqués sont trop graves pour rester légère) aurait pu laisser de la place à la puissance de ses consœurs chanteuses (étant pour la plupart d’incroyables chanteuses).

Il m’est avis que si le parti pris artistique de « Rouge Gorge » (deuxième titre de l’album) ou de « Nos fiançailles » fonctionne correctement, c’est bien parce que Barbara Carlotti est tout à fait audible en solo. Les animaux, les arbres, l’amour… En tant qu’artiste chantant des textes qui sont tout juste pas mal, mais qui ne cassent pas trois pattes à un intermittent du spectacle, je la trouve bien sympa de participer à ce projet. Quid des autres morceaux ? Euuuuuh… Qui n’adore pas Françoiz Breut, vulnérable et néanmoins unbreakable ? Qui ne sur-kiffe pas Verity Susman (Electrelane) ? Qui n’a pas encore appris à faire la révérence devant Chloé Mons ? Alors on ne nous la fera pas : si Hyperrêve a décidé de nous enrôler dans la résistance, ça ne sera pas aux côtés d’une bande de Claudettes, faut pas déconner non plus. 

« Dans les arbres, tu disputais de l’ancien et du nouveau », « auras-tu vraiment déserté ? », « toi qui aimais la liberté »… Nous sommes reconnaissants à Samuel Lequette qu’il veuille bien nous poser certaines de ces questions, mais nous avons besoin - à mon sens - nous avons besoin qu’on nous secoue très fort, qu’on nous bouscule beaucoup plus fort que ça. Il semble plus que naturel de nous demander « si le ciel est beau », en quoi sont importants « le silence et la mer », sans clim, ni notifications, hors-appli, juste en chansons, on est parfaitement d’accord. 

En revanche, même si personne n’est obligé de pousser une grosse gueulante sur ce disque, peut-être les instruments pourraient-ils être agités, voire électrisants ? Elle est où la rage de voir la planète s’effondrer, là ? Hyperrêve nous rappelle que la vie n’est pas faite « pour d’autres que nous ». Certes, la vie est fait pour tout le monde, en effet, et on apprécierait que « Nos absences futures » retirent leurs gants de velours - qui se contentent de jouer de sympathiques et flegmatiques machin-choses- pour nous défoncer les tympans et nous donner envie de faire autre chose que d’allumer nos briquets, quoi. 




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