Prenez une tronche entre Singes Chromés et Gainsbourg, un phrasé à la Miossec quand le tabac et l’alcool étaient son carburant. Ajoutez-y une electro iodée par les bourrasques de l’after punk et laissez l’esprit de Bashung (avec comme climax Oh Oh) infuser l’ensemble des titres et vous obtiendrez Laurent Benitah.
Cofondateur du groupe ZENZILA, il entamera une carrière solo en 2020 (EP Dépareillé). Rien Ne Presse est son premier album, et si son titre n’entame pas le moral du rêveur dilettante, il est à prendre avec des pincettes et un rien d’ironie. Celle-ci est décuplée par la présence à la plume de Brigitte Giraud (les Cailloux pour un duo d’un bleu presque pétrole), prix Goncourt en 2022 avec......Vivre Vite.
C’est avec un braquet aux rouages dépourvus de repos, que Laurent Benitah traverse son album, et les mers aux calmes annonciateurs des tempêtes prochaines.
Burinés par les embruns, les soleils brûlants en réfléchissants, il cherche l’humanité partout où elle peut être, donnant le change en faisant de Crawl Man, une forme de chanson militante avec une lumière donnant à l’aspérité le droit de recouvrir les zones d’ombre de notre humanité souvent bafouée. Conteur tout autant que chanteur, poète soignant ses textes comme une robe de haute couture, Laurent Benitah intrigue, épate et trouble, et nous laisse comme après la lecture de Conrad, Moitessier ou Stevensson, la salive manquante et l’âme de l’aventurier par procuration ragaillardie.
Rien ne presse, disque en eaux troubles à la lumière de la bougie de l’écrivain qui sait que de la solitude née l’envie des grands espaces.