Ébouriffant. No Domination, le cinquième opus de Kap Bambino, m’a ramené au début des 90s, quand sur mon Amiga 500 je passais des soirées à poncer des jeux vidéos, copies de copies de disquettes crackées, sur lesquelles les pirates informatiques apposaient leur signature, via des génériques hyper inventifs, dont les musiques étaient des tueries. Inspirées par la techno belge et hollandaise de l’époque, ces pépites passaient d’ordinateurs en ordinateurs et, au sein de la demoscene, valaient à leurs auteurs une certaine notoriété, au moins égale à celle de compositeurs tels que Chris Hülsbeck (Turrican II) ou Tim Wright (Shadow Of The Beast II, Agony). Tout ça pour dire que le duo bordelais, rescapé de la vague électro-clash des années 2000, est une machine à remonter le temps d’une efficacité redoutable, aux kicks néanmoins parfaitement ancrés dans la modernité : 100 % synthétique mais 100 % punk dans sa quête de spontanéité (les fins de morceaux, comme bazardées), Kap Bambino croise 8-bit et gabber dans un tourbillon de sonorités hard tech azimutées, vrillées, acidulées. Les tracks s’enchaînent à un rythme effréné et il faudra en milieu d’album un Flaccid Life au tempo plus lent – beat étouffé, l’on émerge d’un sale rêve, mais tout éclate à nouveau, il ne nous reste qu’une mélodie à fredonner (la grande force du duo, de glisser des douceurs reverbérées dans la tourmente) – ou le dreamgaze Corsair, pour que l’étau concocté par Caroline Martial et Orion Bouvier se desserre. Treize titres qui filent à toute vitesse, s’achevant sur la doublette gagnante Loss (mille feuilles d’arpèges, super ligne de chant) et Spin Faster : paradoxalement empreint de mélancolie (des textures vintage, comme mesure du temps qui passe et ne revient jamais), No Domination boxe fort.