> Critiques > Commémoration des compiles ADA



Les compilations ADA vont passer le cap des 50, l’occasion était trop belle pour ne pas saluer les artisans de cette série. ( Lire ici)

Parmi tous les artistes aussi sincères qu’écorchés vifs présents sur les compilations ADA, Joseph Bertrand, seul maître à bord du navire Haddock centredumonde, s’impose comme le plus extrême. On n’écrit pas un disque tel que Rêvons plus sombre sans vouloir « purger les vipères » (comme chantait Murat), sans chercher à cicatriser un point nébuleux. Le talent de Joseph consiste à néanmoins prendre un recul salutaire sur son marasme. À en rire même.

Les chansons de centredumonde ne tombent jamais dans une psyché dévorante. Au contraire : malin, espiègle parfois, « glad to be sad », Joseph est probablement le premier à se tourner en ridicule. C’est sa force, son talent fédérateur : à force de vivre et de pactiser avec les idées noires, on finit par les apprivoiser, et y voir toutes leurs absurdités.

Centredumonde compose des chansons certes assez plombées, mais dont la voix blanche et les tournures lexicales indiquent que l’auteur n’est guère dupe de leurs abymes. Écriture subtile, hautement identificatoire, dadaïste, comme un croisement entre Ian Curtis et Bill Murray.

Issu de l’excellent label L’Église de la petite folie (son « fils le plus turbulent » écrivait Gérald de Oliveira), Joseph Bertrand ne détient qu’un défaut : ne pas sortir suffisamment de disques.