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Dans la cour arrière d’une demeure qui se devrait d’être d’époque victorienne, Richard commençait a quitter les couleurs des herbes et arbres, il sifflait Geisha’s noise en pensant aux images qu’il graverait en sillon, son corps semblait vouloir voler dans l’objectif de sa caméra, mais il se devait d’équilibrer les blancs et noirs, trouver le contraste juste assez saillant pour expliquer l’élément sonore qui l’habitait, pout traduire le moment, et le concave, puis le convexe, du son et du mot. Ce parc est de Rennes ? Qu’importe, le sang et la sève sont de là, dans le grain fin de la pellicule, et dans l’élégance d’une voix qui trotte dans sa tête et sors d’elle, de temps en temps, pour éclairer un peu plus une écorce, une fleur, un être. Il choisi le nerf d’une feuille pour répondre a la glaise du visage. Il faut tout prévoir, tout Controller, le groupe arrivera bientôt, il transportera autant de rage que de magie, le clair et l’obscur, et le son pur, dur et atmosphérique qui émane de leurs biographies de vieux loups de terre. Tout doit être prêt a leur arrivé, sous contrôle, les couleurs ont toutes été enlevées, reste ce blanc et noir, véritable héritage d’une époque de Marquis et Ubik. Richard regarde ces reliefs de paysages en monochrome, et y trouve des infinités de couleurs. La richesse, parfois, n’a pas besoin de pigments. Il semble content de son travail, le décor a ce petit accent expressionniste qui résonne dans la basse, et des angles accentués de guitares acérées, et l’air, en ce jour, parsemé d’espaces bleus profonds entre les nuages, semble accompagner la voix entre des rochers de falaises et des vagues nordiques. Tout est parfait, se dit-il, que vienne le groupe.

Sur l’instant, il prend une photo d’un mur humide où une lézarde dessine un portrait maladroit, l’oreille semble un C éclaté. Fracture, avec un K.

Richard s’efface, dans cette ville on sait passer inaperçu alors qu’on est l’un de ces dieux qui résonnent et ont leurs propres échos a l’intérieur des parois. Richard s’efface, imprégné dans quelques affiches de concerts légendaires, dans la texture du papier, là où il est heureux, en arrière plan, derrière l’objectif. Il faut laisser sa place désormais aux membres du groupe, il faut mettre en avant la chanson, laisser faire la magie, juste capter l’onde, et les jeux d’ombres du visage d’un Golem de glaise, et les jeux d’amours et haines d’un guitariste et de son instrument. Blanc et noir.

Ces sons qui entrent dans le décor sont sournois, black snake moan, venin déguisé d’hématites, qui raclent au passage les senseurs sous-cutanés. Se sont des sons âgés et sans âges, se sont des chansons d’hier et des aubes, de nuits et jours. On les attends en perfectos, ce cuir obscur où joue si crument le rayon de lumière, on les attends les yeux cernés de noir, et ils arrivent avec l’iris imbibé de ciel, dans des vêtements de tous, ils sont là, déjà, dans la cour arrière, objets du décor, les mains ont pour relief les os saillants et les mouvements de nerfs a fleurs de peau, et puis le bleu timide des veines sous la pâleur d’épiderme, les gens du nord ont des teintes d’argent, pas d’or, mais presque diamant. Ils ont l’air sage, l’âge donne des impressions de faussaires. Ils ne mentent pas. Ils sont de là, de ces rues depuis le début même du son, ils font partie des particules de cet air, ils sont l’une des notes accrochées au solfège de la ville, et leurs visages copient les murs et les vécus des réverbères, ils sont de là, ils ne mentent pas. C’est que cette ville est matrice, et ses fils ont tous le même esprit, que le temps tord à son gout, mais fils de même mère, de cordes acides et claviers calmes, de mots puissants et de regard spleen. Le groupe est là, la musique peut s’entamer.

Ce style de musique s’entame, il ne commence pas, il s’entame, comme entame la coupure une lame, comme Saturne dévorant un de ses fils, comme s’entame les légendes. C’est une lourdeur faite air, c’est un noir revêtu de blanc, c’est une blessure faite ouverture, c’est une idée rendue palpable, de ces mélodies qui pénètrent comme la bruine dans les vetements d’hiver, généraux voyant leurs troupes bouger dans les tranchées. C’est un son de guerre, des hymnes a lumières, qui font pop, qui font outre-tombe, qui viennent des froids, des nord, et dorent leurs pénombres de lueurs. Ce sont des silhouettes de Giacometti, des corps de Schiele et des regards de Docteur Caligari. Le groupe regarde la guitare et les feuilles mortes, quelque part, le contraste n’est plus seulement entre blanc et noir, le manichéisme, le yin, le Yan, atteint la matière de l’instrument et des feuilles, le naturel, le manufacturé, l’industrie lourde et son épaisseur, la magie des siècles tombés des arbres. Alors que la guitare dialogue sur la vie avec le jardin, la musique s’en va caresser les visages de golems.

Les chansons seront ainsi, murmure le visage maquillé de boue, elles seront a cette image, entre le facies d’un cadavre a l’air de clown triste, Nosferatu poète, et les mains propres et lisses de l’amour dans tout ce qu’il a de beau, il y aura des embruns de la biographie de cette ville, des gens modernes qui n’y sont plus, Philippe, des recoins d’Ubu, des saxos de Paolino Parc, tagada en furie, et complot Bronswick sur fond noir, et puis il y aura David M. Allen pour le voyage dans le temps, puisqu’il y aura le présent, le maintenant, combien d’ans, quarante ? Frakture s’annonce présent. Quand le groupe passe dans le décor, il laisse une trainée entre amer et acide d’une pop salie, raclée a l’écorce d’un rock poétique, de poussière d’hier qui s’enflamment au contact du nouvel air, une empreinte sonore d’éclaireurs en quête de lueurs, quitte a incendier des fleurs profondes, quitte a attirer les insectes dans leur néons bleus dans un hommage-héritage beau a en bruler, Ô, l’amour est atomique, la basse nucléaire, s’il s’agit d’explorer, si il s’agit de briser, rien de mieux que la fracture, Frakture atomise le jardin.

Regard guitariste-guitare. Le groupe se regarde comme on fusionne l’acier, dans la chaleur extrême, Sergei, Pascal, Pierre, Laureline, tous ces noms de guerriers de salles qui ont tant regardés leurs instruments se forgé des sons, viennent au jardin découvrir la suite des chansons, ce qui vient de naitre se doit d’être. Richard explique au groupe la philosophie du son quand il est image. Voici le propos, vous poser l’armure de milles question dans ce dialogue, eux, unis comme un seul homme, une seule blessure et un seul bonheur, écoutent les mots en tapant le rythme d’un poing sur le cœur, et ce geste soulève les feuilles par terre, l’instant est beau, il ressemble a tout ce travail gravé en sillons, éternisé dans la commissure des lèvres, et quelque part dans les murs d’affiche de Rennes. Ils observent le moment, ils se doivent d’être fiers, l’orgueil du travail bien fait, le son est un digne successeur, un héritier encore jeune des légendes urbaines, qui demande déjà a croitre dans d’autres parcs, en toutes cite, ils peuvent désormais regarder le film sonore qu’ils proposent, tout est parfait, commençons, reprenons ce trajet, et ceux qui seront trop aveugles pour voir, écouterons nos puissances et faiblesses, là, naissent d’autres images, en noir et blanc, avec teintes d’infinies couleurs.




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