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Le Gascon est une langue étrangère dans son propre pays, dont la défense est importante et la vitalité n’est plus à prouver. Artús l’a choisi comme véhicule de ses idées , peut-être un peu pour ça.

Parce que oui, chez les Artús on chante en Gascon. Comme au temps des troubadours, sans être pour autant de ceux dont l’Histoire retint entre autres choses qu’ils mangeaient une fois leur représentation achevée les restes du repas des seigneurs tombés au pied de la table. Oh ça non ! Eux, dès leur début, décidèrent de renverser la table, et de danser la gigue sur la carcasse du suzerain.

Vingt ans plus tard, l’approche est la même, leur sixième LP Cerc est là pour en attester. Une symphonie en six mouvements pour un disque à la mystique "profonde" et assumée, axée sur l’histoire de la découverte en 1950 d’un gouffre immense au fin fond des Pyrénées dans le Massif de la Pierre-Saint-Martin. Un abîme pouvant contenir la Tour Eiffel et dont l’entrée est à peine visible à la surface. Un puit géologique monumental qui a amené le groupe à explorer d’autres failles, d’autres fractures plus abstraites et philosophiques. Les leurs autant que les notres sans doute !

Tout ça avec ce qui les caractérise depuis longtemps : cette faculté à gérer les oppositions de styles et de genres, à générer du compromis sans compromettre ni l’équilibre précaire de leur musique plurielle ni les désirs de chacun des six membres du collectif. Une véritable gageure en somme, d’avoir pu durant ces deux décennies mélanger sans tout faire déborder dark folk in opposition, noise, acousmatique, musiques traditionnelles, expérimentations AksakMaboulesques et rock progressif. Pour parvenir à un résultat aussi chiadé et percutant que ce Cerc.

Voici donc un disque qui fait avancer la musique. Et ce n’est pas rien par les temps qui courent. D’autant plus quand le geste s’accompagne d’une telle force évocatrice.

Lorsqu’on écoute cet album, c’est inévitablement comme descendre dans ce gouffre avec l’inconnu comme unique compagnon de voyage - intérieur comme extérieur - enivré par sa profondeur abyssale, terrifié tout autant par ce barathre incommensurable.

Chants rugissants aux accents chamaniques, musiques telluriques aux effluves éruptives, tout est ici à la fois novateur et sans âge, étrange et pourtant familier. La Réalisation de ce grand fantasme du retour aux sources.

Mais ne vous y trompez pas, Artús n’est jamais dans le démonstratif. Encore moins encastré dans les codes et les références idiomatiques du passé. Tendue et renversante, leur musique, cet art total (le visuel est depuis un certain temps partie intégrante du projet) est tout bonnement un présent fait au futur. Et définitivement une beigne sonique phénoménale lancée à la face de la tradition, cette vieille daronne qui n’est désormais pas prête de trouver le sommeil. Les Gascons et leur label de défricheurs Pagans y veilleront !




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