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Sauf que. Sauf que quoi ? « J’ai levé l’ancre, et je n’ai nulle voilure » – bel exergue que celui du Suédois August Strindberg, dans la langue de Molière, ouvrant son magistral et peu connu Inferno, dont l’action se déroule rive gauche, rappelant les pérégrinations de Dante et Huysmans du côté sombre d’un Paris ombrageux, qui se préfère ombre de cathédrale plutôt que boulevards dispendieux, même si notre théâtreux / peintre de Stockholm eusse préféré une gloriole certes éphémère, mais rémunératrice. On se souviendra avec admiration de Godspeed You ! Black Emperor et, sur le dingue de chez dingue album Yanqui U.X.O., plus particulièrement du morceau Rockets Fall on Rocket Falls, qui me ravit d’années en années, malgré les souvenirs ambivalents que j’ai du post-rock – Mogwai accompagnera mon mariage, Mono mon divorce. Si j’évoque le combo canadien, c’est parce qu’à lui tout seul – Transcending Rites étant l’énième projet d’un Déhà en fusion, qui se fiche du décret posé par les figures tutélaires du black métal, qui en ont décrété la mort il y a vingt ans (avant Internet, qui marque le début du partage, donc de la démocratie, donc de la lose), il me faudra des milliards d’années pour en parcourir l’œuvre et également le catalogue du label Transcendance, dont je deviens écoute après écoute fan – Trinity and Ecstasy chasse proies et ombres, proies d’ombres, en des terres harassées, et il le fait fait certes avec une production DIY mais avec une maestria et une conviction qui va à l’encontre du harassement décrété par les grands anciens. Les guitares électrifiées, mille-feuille noise de courtes suites d’accord mélancoliques, portent en leur cœur un goût prononcé pour la mélodie et la déconstruction, à tel point qu’à l’écoute des deux morceaux qui composent ce nouvel album, au-delà des standards attendus (voix hurlées grognées en fond de mix) l’on entend aussi bien Sonic Youth (six cordes désarticulées) que Les Thugs (chœurs sous-mixés et mur du son). Deux titres, une quarantaine de minutes, du psychédélisme à tous les étages, de quoi rendre gorge à un genre mourant – le post-rock – et découvrir un artiste passionnant, kaléidoscopique et insaisissable. Lever l’ancre sans voilure, avec Déhà, alias Transcending Rites, pas besoin de boussole, on file au vent, et putain ça fait du bien.




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