Souvent, la vie naît des cendres. Généralité optimiste dans un monde enclin à privilégier la terre brûlée (après nous, le déluge), mais les clermontois Ocre – dont le patronyme fait référence au pigment notamment utilisé pour les peintures rupestres du Néolithique – refusent de se laisser abattre par la morosité ambiante, même si leur (génial) premier album, So Often Lifeblood Comes From Ashes, est sacrément mélancolique. Amis depuis leur rencontre sur les bancs du lycée au début des 00 s, Pierrick A. (chant, guitare, basse, claviers) et Damien A. (batterie) ont fait florès dans diverses formations locales, avant d’unir leurs forces et de publier, il y a trois ans, un EP inaugural au nom inspiré (First). La très grande force du tandem, c’est la science du contraste, telle que pratiquée par Dinosaur Jr. et Sebadoh : les mélodies accrochent l’oreille, les guitares défouraillent, les structures dérapent, montées de fièvre et accalmies se succèdent, l’on pioche dans le punk, le grunge, le stoner, le hardcore ou la noise, mais invariablement l’ensemble paraît doux et vous collera un putain de spleen. De l’introductif Don’t Worry (chant grave sur couches de décibels, pont post-rock metal, refrain qui tue – un tube) à la magnifique ballade sépulcrale So Long (le fameux slow de hardos... oui on peut taquiner Scorpions et Metallica, mais qu’est-ce que c’est beau ET efficace !!!), en passant par le très Queens of the Stone Age Don’t Count On Them, et son final post-rock virant au punk-rock, Ocre fait tout super bien. Il faut dire que la voix grave de Pierrick, qui jamais ne force ou ne surjoue, est un atout considérable – rampante, sur un It Was Nothing qui rappelle Soundgarden ; fluide, sur In The Mirror (où il est rejoint aux chœurs par Leila A. et Julie S.) ; gothique, sur le ternaire So Often. L’alliance du gros son et des harmonies ciselées, j’adore : l’inventif So Often Lifeblood Comes From Ashes se voit d’emblée réserver une place dans mon top de fin d’année.