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« Cette musique, toujours en DIY (do it yourself, avec nos petites mains), n’existe que parce qu’elle est écoutée. Je la cherche nuit et jours depuis tout petit, je l’entends, je la reproduis et je la donne »

Cette phrase, au tout début d’un dialogue entre deux inconnus qu’un son a noué, définit enfin la réalité d’un musicien, non seulement l’obsession pour le son, mais aussi le besoin de transmettre. Ce petit discours a lui tout seul, est l’aveu de milliers de rêveurs qui secouent leurs âmes pour exprimer, la notion parfaite de ce que Cohen appelait les merveilleux perdant, ces illusionnistes illusionnés qui lancent leurs ondes d’espoir en forme sonore, qui n’existent que pour ce propos, même si en retour, la musique les nommera maltraités ou superstars. Oui, Fabien (Fabien Guy, aka Courroux, alias Liqueur brune), tu viens avant même d’entamer le débat, d’avoir toute la raison, et m’a laisser pendant un long moment me sentir inutile. Ton plaisir est là, ton désir aussi, le prendre-donner qu’on a tous dans le fond, mais que certains rendent beau, plus que d’autres. Me voici inutile de mes mots, le temps juste d’écouter ces titres juste après cette intro au verbe si exact. Etre inutile de ses mots, pour un écrivain, c’est atteindre une apogée, laisser parler la musique seule, être heureux. Courroux, légèrement teinté de ce pessimisme-timidité de celui qui fait tout seul et se lance enfin aux fauves. Les pieds sur terre (décolle parfois, l’envol est possible), Courroux nous dévoile ses premiers pas, faits de structures sonores dont les battements de cœurs ne cessent , travaux de chercheur fou, de romantique a électricité statique, amateur de lueurs et expressionniste d’ondes, tout ça, dans des thèmes où s’entrechoquent ses dilemmes, tant la rage peut être guitare, tant la clarté peut être rythme. Son travail, instrumentaux, a une claire influence des découvertes de fins d’années 80, quand les synthés devinrent peu a peu humains, mais accepte les tentatives un peu déjantées de groupes des années 70, le psychédélisme affamé de nouveaux sons, ces machines neuves qui ouvraient des portes dans l’âme, l’apport neuf réside dans le jeux en arrière des autres instruments, comme une révolution sous-jacente des néo-classiques guitares, les constants va-et-vient du songe au réel, l’usage rythmique du contraste, qui rend chaque pièce personnelle, d’une personnalité a découvrir, a creuser. On retrouvera alors dans ces petites batailles, des chocs entre NIN dans le fond et ses guitares buboniques de Cure, ces acidités expressionnistes, ces flammèches des instrumentaux de Depeche mode, ces fonds de puits de Joy Division et ces clartés d’expérimental quasi Jazzy, ces atmosphères T 21, ou quand 4AD avait la clef des champs, ces ambiances glauques de Rue de Siam (Les ronces, hummmm) et ces arpèges de quand Genesis, Jethro tull et autres cherchaient l’autre mot pour dire musique, parfois même, la fureur d’un Front 242 a visage humain, c’est-à-dire un Rammstein visuel. Courroux a tout pour exister, pour vivre, respirer, le temps qu’il voudra sur sa planète d’introspection, d’intime bousculade, Courroux a tout pour vivre, ces coups de gueule et ses paix, ses frontières malléables et ses limites sans grillages, car, monsieur Fabien, señor de Lavapies, quand on arrive a cette hauteur de l’instrumental, on ne doit plus avoir peur, quand on a compris avant beaucoup d’autres qu’il s’agit de donner , que la musique, son essence, sa moelle épinière, est ce qui émane de nous, n’est plus a nous, mais est a ceux qui reçoivent, alors qu’importe la crainte, les lendemains, sont possibilités, les prochaines ébauches sonores, sont déjà des ajouts, des atouts, des renouveaux, des pas en avant, quand on a compris avant tout qu’il faut savoir être soi pour que les autres soient enfin nous, l’art, est inclus, inné, trouvé, adopté, et montré.

Alors voila, mon cher presque compatriote ibère, cher Fabien, voila pourquoi j’ai eu envie, toujours humblement de parler de toi, ce n’est pas seulement pour la musique, je crois qu’en cela, tu es assez génial pour t’exprimer tout seul, et que tes sons parlent de toi beaucoup mieux que moi, mais surtout pour cette notion naturelle que tu as de la musique, qui devrait être loi de vie, parce qu’honnête, appliqué et légèrement ingénu, tu as dit une vérité énorme, appuyé par du talent, et un gout exquis pour la composition et le contraste des sentiments, un don pour les instruments, et un esprit créatif mue par le plaisir des autres, bravo, hombre, bravo artista.




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