The Sweet Kiss… Le nouvel EP de Centredumonde, cette fois-ci en collaboration avec la talentueuse chanteuse nantaise Claire Redor, porte bien son intitulé : cinq titres d’obédience électronique (mais pas que), tendrement proches de l’auditeur car empreints d’une douceur humaine typique des compositions de Joseph Bertrand. Cinq titres dont une adaptation d’un poème de Wilhelm Müller, et, surtout, une reprise époustouflante du “Cambodia” de Kim Wilde dont l’inattendu final pourrait évoquer une scène culte du film Dans Paris de Christophe Honoré.
Cet intitulé, The Sweet Kiss, nous renvoie inévitablement vers l’un des classiques de New Order (“The Perfect Kiss”). Car Joseph, à sa façon, est pop comme l’était (l’est ?) la formation mancunienne : des phrases chocs qui s’incrustent à vie dans les esprits – “Quelque chose (ou quelqu’un) à aimer” –, une sobriété musicale qui témoigne d’un méticuleux dosage dans le choix des instruments, des souvenirs d’enfance qui constituent dorénavant la matière d’une vie adulte. Une pop poignante, accessible, ouverte au monde (contrairement à ce que laisserait penser la légendaire mélancolie de ce sacré personnage), qui, sur cet EP, dialoguerait à distance avec l’album Froids de Matthieu Malon.
Et puis, on ne le dira jamais assez, Joseph Bertrand écrit des paroles parmi les plus réconfortantes de l’époque. Alors oui : tristesse… spleen… morosité. Probablement. (Encore que : depuis l’album Tigre, avec états d’âme, une lumière devient de plus en plus palpable chez Centredumonde). Sauf que cette mélancolie est saine, jamais dans le registre de l’auto-apitoiement (guère le genre de Joseph), parfois suffisamment distanciée pour que son auteur puisse en sourire, une mélancolie finalement commune à tous. L’une des nombreuses forces de Joseph Bertrand est justement de ne pas refuser d’écrire sur ce qui généralement ne dépasse jamais le stade du secret intime ou de l’inavouable. Artiste essentiel, donc.