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Sankofa aurait pu n’être qu’un emcee du dimanche, le genre de type qui, le week-end venu, met sa vie de monsieur tout le monde entre parenthèses, monte sur une petite scène d’une petite salle d’une petite ville américaine et, regaillardi de cette expérience salvatrice, affronte plus sereinement les contraintes de la vie quotidienne. Mais voilà ! Bien qu’officiant dans les eaux les plus troubles de l’underground américain, notre barbu de Fort Wayne n’est pas un simple amateur averti, il est ce qu’on pourrait appeler l’ideal-type du rappeur indépendant, un activiste de l’ombre qui tient plus que tout à sa situation d’artiste précaire parce que seule celle-ci lui permet d’entrevoir sa relation à la musique avec la sérénité de l’homme qui ne doit rien à personne. Etre délaissé des medias, Sankofa s’en bat les roubiniolles. Depuis 98, il trace sa route en marge de l’idéologie mainstream du "je vends donc je suis", sort des disques avec les moyens du bord et les marchande à perte avec comme seule fin espérée l’inutilité d’un Thank You Sanko !!! Alors vous me direz, ni vous, ni moi n’iront nous plaindre d’une telle démarche, en revanche peut-il en être de même question contenu ? Sankofa, je vous rassure, fait du bon hip-hop, un hip-hop certes classique quant à son approche stylistique et imprégné de références mais qui, loin de tomber dans l’évidence paraphrastique, se veut assez imaginatif et personnel pour exister hors de cette masse d’artistes trop uniformes qui compose l’armée de réserve du rap middelground. Un hip-hop qui n’a pas pour unique horizon la seule asphalte charmante de Fort Wayne et qui, au lieu de se soustraire à un certain sectarisme géographique, multiplie les collaborations au-delà de son bon vieux état de l’Indiana, s’enrichie d’influences aussi proches que lointaines et n’a de cesse d’élargir par-delà les frontières américaines un réseaux d’amis tous aussi intéressants et nébuleux que lui. Pour autant sur son premier véritable album : The Rosetta Stone, ce besoin de partage artistique, aussi honorable qu’il soit, nous avait malheureusement dessiné ses limites. A trop vouloir jouer les auberges espagnoles, contenant à peu de chose près autant de producteurs que de titres, ce premier Lp perdait ainsi en cohérence là où il croyait justement gagner en consistance. Or pour ce tout nouveau Still Means Something, non seulement Sankofa nous refait le coup d’une sortie confidentielle mais surtout, côté collaboration, il s’est mis au régime sec, laissant principalement à Fangface le soin de tisser la plus part des canevas sonores de ses bons mots, canevas qui ne raviront sans doute pas les esthètes du genre mais qui ont au moins le mérite d’être suffisamment efficaces pour mettre en valeur ce qui reste finalement l’attrait principale d’un album de Sankofa, à savoir Sankofa lui-même, sa voix rauque qui en fait des tonnes, qui pue le plaisir de raconter ses petites histoires toujours remplies d’intelligence et d’humour, une gouaille qui ne calcule pas son temps parole, pleine de sueur et d’engagement. Mais je vous la fais court car cet album en définitive vous ne l’écouterez jamais et une chose est sûre : vous avez tort ! .




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