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En quittant la nature, l’homme s’est pensé créateur. Il a considéré la nature comme un autre que lui, s’excluant par la même de l’histoire même de la planète sur laquelle il cohabite. En quittant ce règne animal et végétal, il s’est enferré dans la pensée du nombrilisme, ne s’inscrivant pas dans l’histoire, mais pensant être l’unique créateur de celle-ci. Sur son piédestal d’histrion jouant devant au fond de scène en ruine, il s’arqueboute sur ses croyances, même les plus improbables, oubliant que l’imaginaire qu’il s’est créé est devenu le mausolée dans lequel il va s’enterrer. Après avoir fusionné avec les arbres et la nature, L’Effondras entre en guerre avec « Anabasis », disque ample et destructeur, cheval de Troie improbable qui jette bien plus que les bases d’une musique qui dans sa construction même est un programme de réhabilitation de ce qui doit tous nous réunir. Couvrant le bruit des vacuités qui nous inondent, L’Effondras n’entre pas en dictature, mais explosent la notion même d’enfermement, faisant du bruit et les constructions mélodiques, les bombes à fragmentation pour un nouveau projet. Les esquisses sont posées, les fondations solides, mais ouvertes à la concertation, même quand le langage n’est pas un vecteur possible. Sans aucune concession avec les susceptibilités, L’Effondras tisse une toile et fait des propositions ( « Ce Que Révèle L’Éclipse ») sous l’orage, avec la liberté grisante mais parfois inquiétante de celui qui accepte de se laisser guider par les courants (« Aura Phase » monumental) de donner au hasard, non pas son rôle de frère de sang de la chance et de la coïncidence, mais bien celui qui lui doit être dévolu, celui de l’histoire.

Pas une seconde « Anabasis » ne vous laissera le temps de vous fourvoyer à une autre pensée que celle de reconnaître qu’en-dehors de la contemplation la vacuité du monde est une valeur dans laquelle le refuge n’est plus tenable. « Anabasis » donne à écouter, à voir, à penser et à ne plus questionner les secondes à venir, juste à les vivre. C’est un disque qui s’arroge le privilège de nous prendre à témoin sans nous contrarier (la poésie est vivace « Norea »), déminant une à une nos routes piégées vers la sensation de liberté. Les mots sont forts, mais le disque qui n’en a pas, fait naître une réflexion qui repousse nos retranchements scrupuleusement scellés depuis des siècles. Ce disque n’est pas la fin de l’histoire, c’est l’idée même de celle-ci sans ses béquilles. Une attaque massive et apaisante.




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