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Fondé en 2020 par RowenaM et Christophe Devaux (alias Yokiko Kamurasa – dont l’album « Come With Me » avait en 2013 fait l’objet d’une chronique élogieuse sur ADA), Satyriasis & The Nympho sort sur le label Les Disques Normal (Yes Basketball, Les Marquises, Mermonte, etc.) un premier opus au titre particulièrement intriguant, « L’Assassin aux Dents Blanches ».

Riche d’une solide expérience au sein des projets Absinthe (Provisoire) et Sap(e), Christophe Devaux a composé pour le théâtre, la danse et le cinéma, investissant des registres variés tels que le post-rock, l’ambient et l’acousmatique, tandis que son acolyte RowenaM nourrit un blog de textes inspirés par ses errances et réflexions nocturnes, de photographies érotiques et de vidéos : c’est elle qui mettra en mots et en images les six morceaux issus de leur fructueuse collaboration.

Imprégné d’une ligne claire brouillardeuse que ne renierait pas un Spiritualized acoustique, « What’s Happening ? » pose les bases d’un album envoûtant, où tout semble enregistré au plus près du point de rupture, collé contre le microphone, voix – mixtes, chant en anglais et en français – noyées de réverbération et guitares à la limite de la saturation : ça vibre, ça grésille, ça s’étire, les structures sont concassées, avec pour seul objet l’élaboration d’une atmosphère funéraire, à l’instar d’un « De l’Origine à l’Horizon » qui, dans un mantra hypnotique oscille entre spoken word et mélancolique mélodie – The Besnard Lakes n’est pas loin, le jour non plus, sauf qu’il n’apparaîtra jamais, puisque personne n’a besoin de lui.

Ainsi, « L’Assassin aux Dents Blanches » dévoile patiemment ses charmes, son spleen, sa pureté minimale, et l’on ne peut sans nul doute qu’être séduit par autant d’atours, même si au fond, tout au fond, une ombre interroge la pertinence de la proposition formulée par Satyriasis & The Nympho, prégnante dès le nom du groupe : en effet, quoi qu’en pensent les thuriféraires d’une liberté des corps invariablement fantasmée, mettre en scène et questionner la sexualité est devenu un inénarrable pensum contemporain, auquel s’attelle chaque génération, persuadée d’être moins contrainte que la précédente, quand bien même le récit jamais n’évolue – des tendres accolades entre Gilgamesh et Enkidu aux b(r)aises tristes de Catherine Millet, quatre mille années de frissons charnels (parfois) mâtinés de transcendance affective nous contemplent.

Le cul, le cul cru ou le cul érotisant, le cul brutal ou le cul intellectualisant, ça ne concerne que celui qui s’en prévaut et se pense valorisé par le cul, et valorisé par la fausse liberté que son cul lui procure : qu’on le veuille ou non, au 21ème siècle, faire du cul un viatique, c’est banal, c’est triste, c’est cheap – le numéro estival « spécial sexe » des Inrockuptibles et ses injonctions au fist-fucking en sont le bien triste symptôme.

Alors oui, « L’Assassin aux Dents Blanches » est un bon et bel album qui musicalement s’avère d’un très grand intérêt, voyage planant en des terres post-folk lysergiques, mais il aurait gagné à aborder des sujets moins battus et rebattus pour magnifier une production lo-fi assumée qui fait des merveilles. Désolé pour les intellos du sexe, Ovidie et En Marche Noire en tête : le sourire qui tue s’admire dans un miroir, il ne séduira que lui, quand bien même il aurait charmé la terre entière s’il avait su s’accompagner de textes moins inutilement salaces.




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