Ce n’est pas à proprement parler un perdreau de l’année que Seine et son mentor Ivan Ščapec. Commencé en 2007, le groupe obtiendra une reconnaissance tardive, dix ans plus tard, lui permettant d’enregistrer un album en 2017 chez Moonlee Records. De mémoire, je ne pense pas avoir un jour localisé un groupe en Croatie, cette langue n’étant pas connue oralement chez nous, mais plutôt par les pieds des artistes du ballon rond.

« Naizust », troisième album, est donc une découverte intégrale, d’un univers que l’on pourrait localiser sur la carte des musiques actuelles, comme un Nearly God. Il y a de quoi être obsédé par le gimmick qui traverse ce « Riječ », à la douceur inquiétante, à la tension à peine refoulée sous une nonchalance que le chant androgyne d’Ivan accentue. La caresse du serpent avant le venin, car Seine cache bien son jeu, et sort facilement du lit dans lequel il irrigue son œuvre. Tel un aéroglisseur un titre comme « Lalolije » nous fera planer au-dessus de la surface froide et humide qui pourtant trace ses lignes de suggestions dans la sécheresse (« Zakaj » tel le remix d’un « numb », robotique et anxiogène, entre zones de production et zone de guerre). L’album est construit comme un reportage, avec ces moments de prise de contact, de paroles, et ces plages de plongées in-situ, avec comme climax « Automatsko Pisanje 1 » et « Automatsko Pisanje 2 » , exercice d’écriture automatique, telle une incursion dans une zone de guerre virtuelle.

Avec « Naizust », on entend que face à la situation du monde, le trio tente de garder un regard lumineux, mais ne peux isoler l’inquiétude et la mélancolie. (Situacija), Seine traverse donc le monde, jouant comme sur un damier avec les pièces de son jeu qui n’a qu’une seule règle, s’aventurer pour durer, s’extraire pour parfaire, éviter les débordements pour ne pas détruire. Post Millenium Tension.