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La musique a longtemps été décrite comme une nuisance, on attribue le bruit désormais à la vie moderne, à un environnement sonore qui précède la vue. Englués dans nos habitudes, cernés par le conformisme, ayant l’impression d’être libres par nos loisirs, nous en oublions sa signification. Nous sommes en quête perpétuelle de liberté, d’amour et d’aventures, paradoxe troublant c’est dans le métro que sont affichés des publicités pour des produits naturels, la solitude et le sexe. On en ressort abrutis, excédés, fatigués. Sensation d’être ailleurs là où nous ne sommes pas présents. On assiste depuis peu à une collision inattendue d’artistes dont la singularité est de rompre avec l’ère de l’hyper-modernisme. Un retour aux fondamentaux, aux racines de l’instrument acoustique.

Julien Ledru revendique cet ancrage musical hérité du folk de John Fahey, du phrasé de Peter Lang, du blues de Elizabeth Cotten. De ce creuset, Julien s’est forgé une véritable identité à rebours des courants musicaux en vigueur.

« Petaluma » évoque le folk mélancolique de Voice Of The Seven Woods, le picking de Steffen Basho-Junghans, les étirements sonores de Ulaan Khol. A vouloir réduire un instrument à son unique fonction, on en vient à oublier les nombreuses possibilités qu’offre l’acoustique dans sa phase d’enregistrement. On y entend les dissonances, les cordes frottées, la nudité même des cordes dans leur plus simple composante. Julien Ledru ne s’égare jamais, au contraire, sa musique se déploie lentement, les deux parties distinctes de « Mellotone Valley » qui ouvre l’album, sont contrastées par la luminosité expansive qui prend forme et dissipe les brumes du commencement. Julien s’aventure là où on ne l’attend pas, non en terrain conquis, mais comme naturaliste. Il nous faut apprendre à écouter. Avec « Mellotone Valley », troisième album de Julien Ledru, on prend conscience de toute une réalité sur laquelle s’enracine la création artistique, depuis l’acte de composition jusqu’à sa finalité, son intemporalité. A contrario de la musique électronique, l’acoustique ne subit pas les affres du temps. Quelque soit le nom qu’on lui attribue, cette musique traverse le temps. « Be Gone, Begonia » dépasse amplement les brèves descriptions de "musique de fond" que la plupart des critiques assignent maladroitement, ils en oublient même de plonger dans la véritable matière sonore, dans son essence même. Ce disque a pour but de dépasser les frontières des sens, sans artifices.

Après « The Fire and the Bear » premier extrait de l’album, le single « Mellotone Valley » est sorti le 1er Septembre et mérite une écoute attentive, sans aucune distraction.