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Alors qu’Alone With King Kong m’avait conquis il y a peu avec son premier long format, il nous revient pour ce split avec S8N. L’attente est donc aussi forte que la surprise, car AWKK semble avoir (peut-être juste pour l’occasion ?) mis plus le cap outre-Atlantique qu’outre-manche. Autre chose aussi, les six titres sont surprenants d’intensité, parfois de violence suggérée et de noirceur. Au final c’est surtout beau, et s’il y a bien un trait particulier encore plus souligné que jamais, c’est son talent fou d’arrangeur. L’ep fuse d’idées, de subtilités qu’un bon casque vous révèlera, ou un bon système audio. Et toujours ces mélodies qui attraperont vos oreilles, pour ce voyage dans The dark side of AWKK. Et ceux qui composent se demanderont "mais pourquoi j’l’ai pas eu cette idée ?" Il y a aussi le chant, admirable, enivrant, d’une maîtrise totale. Rien qu’à écouter les parties harmonisées de "Private Jokers" je suis pris dans le morceau. J’aime beaucoup aussi la fin, avec ce sens tubesque de la mélodie qui va se scotcher sur vos neurones ébahis. Ce que je viens de dire est presque un axiome qui vaut pour les six titres, d’une très grande régularité dans l’excellence. "If only" alourdit le propos (même une voix déchirée limite hardcore en overdub, clin d’œil à son passé de violence musicale ?). "Knives out" nous envoie un peu dans le bayou, mais avec cette classe toute anglaise qui habite le spectre du subtil gorille. On croisera d’ailleurs de jolis spectres dans tout ça, forcément ses anges gardiens les Fab Four, mais aussi Elliott Smith, Midlake, Nick Drake...Mon coup de cœur va à "Try/fail" pour sa construction, sa mélodie, et ce petit truc 90’s, peut être parce que, aussi lointain que ça paraisse, il me fait penser aux morceaux calmes de Soundgarden (sur Down on the upside), ou plutôt au premier Chris Cornell en solo (très Beatles d’ailleurs ce disque). Au revoir sur l’énigmatique et suspendu "Tabula rasa", après lequel on espère un retour rapide !

En deux ep’s et un long format, Mr Rocton continue à assembler une discographie impeccable. Je suis sûr que dans 10 ans on se retrouvera pour un tribute en son honneur.

L’autre disque est la première offrande solo de S8N (Seighten soit SATAN prononcé à la Peter Tägtgren), rebaptisé depuis The Holy Mundane. L’homme en question est pourtant un sacré récidiviste au passé chaotique (Dead For A Minute, Short Supply...), mais aussi moins chaotique avec Twin Pricks par exemple.

Ce cher Florian Schall, très connu des amateurs de vinyles, nous sort enfin (quelques années après une première tentative sous le nom Trippy Eden) ce qu’il a au fond de lui. Résultat ? Six titres qu’on pourra, pour faire vite, qualifier de pop indé à légère tendance mélancolique et nostalgique. Même si l’objet dual n’a pas vocation de duel, une comparaison s’impose ! Là où AWKK joue les orfèvres, S8N joue la simplicité et le naturel. Et les deux galettes, sous le signe de l’honnêteté, brilleront ensemble par leur complémentarité. Etonnant, rien à voir sur la forme, mais sur le fond, ça me fait penser à The Love Below d’Outcast.

Les textes de S8N sont comme ces pensées qui vous traversent dans ces moments de solitude et de lucidité toute personnelle.

Et la musique ? Bon ce que j’aime avant tout c’est la voix. Mais "After the bomb" a tout de l’hymne pop, oui l’hymne, celui que tous reprendraient sans le savoir, celui que vous sifflerez inconsciemment. Un vrai appel du cœur, c’est beau, puissant, brillamment composé. Le titre commence par la fin, la bombe, puis la vie reprend doucement jusqu’à son apogée. Le thème vocal pourrait durer deux minutes de plus que ça ne me gênerait pas. Les autres morceaux sont très bons également, comme ce "Curse in words" et sa ritournelle vocale. J’aime beaucoup ce sens de l’immédiateté, je saisis le propos, je peux chantonner avec, du coup le disque me suit partout. Les arrangements simples accompagnent parfaitement les titres sans jamais leur ôter leur essence, déjà bien assez forte. Il y a une sorte de tristesse diffuse dans cette partie, un côté jour de bruine, feuilles mortes, mais sans complaisance dans la mélancolie. Je pense que ça doit être un sentiment intrinsèque à tout lorrain..."Mistaken identity" sonne sixties, pour mon plus grand bonheur, surtout grâce à la rythmique, mais décolle vers un temps plus proche à la fin du morceau. C’est très adéquat avec le titre tiens ! Ici aussi on a un petit gimmick bluesy avec "Slow day at the office", et sa ligne de voix très rock’n’roll, back in the 50’s !!! Rock’n’roll oh oui, d’ailleurs il ne se retient pas d’exploser, d’envoyer la purée, genre sale gosse qui faisait si peur à nos grands-mères à cette époque où choquer avait encore du sens. Avec "The void", il me semble reconnaître les grands amours fin 90’s de l’auteur, à l’époque où l’emo avait un sens (Mineral, Elliott, Monochrome...). Oui je parle comme un vieux con, mais croyez-moi ou non, les trentenaires d’aujourd’hui parlent comme les grands-parents d’hier.

L’équilibre et la diversité sont au rendez-vous, cohérent tout en étant hétéroclite. J’ai aussi pensé à Rocky Votolato, pas pour la voix, mais pour ce côté naturel et simple de vous faire adhérer à des chansons, sans prétention aucune, mais avec un talent indéniable.

Une belle palette locale d’invités aussi, et bravo à Doc Geo pour ses parties de batterie, qui relèvent avec justesse les morceaux de son faux jumeau. Un défaut ? Avoir eu un morceau aussi fort dès le départ, que j’ai tendance à remettre trois fois avant de passer à la suite. Mais est-ce vraiment un défaut ? En tout cas j’aimerais que beaucoup de disques aient le même. Double bravo les gars.




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