On peut souvent nous taxer, nous les chroniqueurs à la petite semaine, de trop chercher les références, d’en aligner comme Depardieu aligne les verres de Vodka, oubliant la substantifique moelle de l’œuvre. C’est vrai que parfois nous exagérons, voyant Radiohead, Arcade Fire ou Marie Paul Belle à chaque détour d’une chanson, sous prétexte que le fa dièse d’Idiotheque se retrouve au beau milieu de telle ou telle chanson. Bref oublions les références, sauf que présentement, pour ce « Rot In The Sun » ne pas parler de Nick Cave reviendrait à ne pas parler de Michel Fugain quand on chronique un album de Cali. Le ton de l’australien est ici si présent que l’on se demanderait presque si celui ci n’a pas décidé de nous faire un coup à la Damon Albarn avec Gorillaz. Mais le ton, et même la musique sont trop proches des Bad Seeds pour répondre à une envie de ballade loin du quotidien.
« Rot In The Sun » est en dépit de sa filiation un disque qui nous happe, par ses textes à la noirceur collante et surtout par sa construction, les titres s’enchaînant intelligemment, faisant de ce disque un bloc que l’on écoute comme on lirait les chapitres d’un roman, tous se suivants naturellement. Derrière la puissance et les aspirations à la noirceur, transparaissent la subtilité ( « I’m In a Trance » en est l’exemple), la fureur, se laissant prendre par le charme de constructions musicales aventureuses.
Alors prenez en pleine face ce coup de fouet musical, cette gifle puissante, ce disque sortant des ténèbres accueillantes qui peuplent une musique qui fait autant appel à la religion qu’aux pires passions de l’homme. Le rock n’est pas mort, et si certains voulaient l’enterrer, Owen Temple Quartet vient d’en détruire le caveau, plantant à la place des mauvaises graines.