> Critiques > Labellisés



J’aurais du m’en douter, en partant vers l’Ibérie il y a vingt trois ans, j’aurais du m’en douter et changer le billet d’avion, changer le sens de cette boussole qui agit avant de penser, et, au lieu de mettre les voiles vers la chaleur solaire de Madrid, monter vers le givre merveilleux de la Bretagne, plus adéquate a mon âme, mais voila, on se précipite, on court, on n’a pas pris le temps de tout regarder, les guides du routard, les documents des National Geographic, . Après, bien sur, on trouve notre âme sœur et on oublie les bretons et bretonnes qui nous auraient tout autant aimé, surement. Avec le temps et les espaces virtuels, je discute, dialogue et écoute beaucoup plus de gens du nord que d’espagnols, ils m’apportent cet équilibre entre l’effusion Castellane et la profondeur Brestoise, je suis un esprit de pluie fine. Après le typhon Rennais et l’eternel Stivell, je ne connaissais pourtant bien peu de la pointe de terre qui a osé transpercer l’océan, quelques vestiges de Caradec, la lignée de Marquis de Sade, les somptueux Dominique A et Tiersen. Je racolais plutôt a cet espace celte des bribes de Sinead O’Connor et des saxons plus irlandais que Liverpooliens, par marketing plus présents. Mais Marquis n’avait l’air breton que dans son humide froid, je n’associais pas leur talent a cette terre, j’aurais du, tout comme j’aurais du, il y a plus de vingt ans, donner un 80 degrés a mon timon et partir vers la fin du monde. Je pose désormais un index sur cette étendue avec la sérénité que donne le plaisir, et si mon corps a fauté en allant a Madrid, mes oreilles viennent de corriger en allant pavaner le bonheur au Pays Pagan, de Douarnenez a Lorient, de Brest a Cornouaille, de l’Ubu a la Carène. Tout se noue, tout s’accole finalement, ma passion pour Marquis et ma douleur de n’être nord, Parce qu’il y a des gens sur terre qui s’occupent à réaliser nos rêves. Jérôme Sevrette est un de ces êtres qui voit l’avenir là où les autres ne voient qu’un instant, en engluant joliment Nolwenn Korbell, fantastique présence vocale de cette région, et Frank Darcel (je vous le présente ?) alors en service au sein de Republik, en 2016 pour le titre "That kid is different" pour son recueil de photo "Terres Neuves". Un proverbe d’un monde que j’invente chaque fois que j’ai besoin d’un proverbe dit que "là où se clouent les chaleurs saignent les bonheurs" Le clous était planté, on attendait l’hémorragie. Elle arrive enfin, sous le nom humble et vrai de Nolwenn Korbell’s Band, et le disque "Avel azul". Les compositions sages, épicées ça-et-là d’acides et de blessures, aux cuivres jazz et aux guitares stridentes, qu’offre Frank a la voix et ambiance de Nolwenn diffusent les brumes exactes des lieux, et les clartés précises des gens de la terre, des paroles empreintes d’histoires d’eaux, de marées et de pierres noires imbibées de marins, de désamours et de silences agréables, d’une poésie terrienne, qui étend le drapeau d’une langue a l’autre de ce pays celte plus ample qu’un simple regard. En fait, au bout des écoutes, la langue s’efface pour être émotion, langage universel, qu’importe l’Anglais, le breton où le français si c’est l’émotion qui embellie l’âme, si c’est l’émotion, tantôt colère comme abandon, tantôt lumière comme absorption. Ce disque, n’est nullement qu’un duo, jetez un œil a la liste de musicien, ceci, messieurs dames, s’appelle du bon gout, sinon le gout de bien faire, de très bien faire, Geromini, Marolleau, Le Lann, Briot, Illien, ceci est un super groupe en fait, un engrenage de passion et de professionnels , une osmose qui fait que ce disque de rock bien breton et plus loin encore, soit un plaisir intense, un travail ciselé, précis, qui ne cherche pas l’expérience , la tentative, la recherche, sinon l’humain, le présent, peut être classique en fait, mais réellement furieux, jeune et sauvage, un rock aux accents tristes ( jugement surement personnel, les ombrages de vies m’attirent plus facilement que les brulures du soleil), certes, mais aux gestes calmes, attentifs, chaleureux, un disque sans âge ni temps spécial, ni pluies ni étés, a écouter sans autre raison qu’un énorme plaisir, que l’intérêt poétique découvert dans la langue Bretonne (je ne connaissais pas du tout ces mots et leurs sonorités) et la finesse de ce mélange entre le talent de Frank et le don de Nolwenn, et l’appuie plus que généreux et intelligent de tous les acteurs de cet acte breton. Alors voici pourquoi je vais en ce moment même réécouter le disque, pour me donner l’envie et la possibilité d¡abandonner ce sud latin et aller le temps de ces titres prendre l’air d’un pays qui a pour limite l’art et l’amour de ce qu’il crée, non pas une revendication de la Bretagne, sinon sa diffusion, son bonheur.




 autres albums


aucune chronique du même artiste.

 interviews


aucune interview pour cet artiste.

 spéciales


aucune spéciale pour cet artiste.