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Les machines avancent en cadence et chantent leur chant d’esclaves. Leurs articulations fatiguées pleurent des cristaux sans prix, mais pas sans valeur. Tels des Petits Poucet aux pieds nus et noirs, ils avancent dans la forêt aux mains crochues, entraînés par un maître indifférent, ni cruel ni généreux, juste présent. Mais la colère n’est pas éteinte. Un brouillard froid montant de la terre souffle les braises du péché capital. Alors Radio Moscou envoie son signal à travers la steppe, et les nomades de Pauwels captent un mot sur trois de ce poème de Daniil Harms envoyé aux quatre coins de l’univers.

J’ai en tête tous ces groupes instrumentaux, qui sachant faire chanter guitares, basse, synthés et batterie se passent très bien de chanteur, de mots, de textes. C’est une très bonne idée. Et quand chez Pauwels la voix surgit, elle vient du fond d’un rêve, d’un grenier aux parois d’acier, d’un abysse. Puis elle se tait. Beaucoup. Se fait attendre. Oublier.

Richesse des sons, tissés du bout des doigts ou à coups de poings. Amour certain de la matière sonore, sculptée, modelée, tantôt fluide, tantôt épaisse et rugueuse. Science des transitions, douces ou brutales, toujours en intelligence avec le propos. Tout cela génère un appétit.

Par moments, la proposition avoisine le wagonnet du grand huit aux roues mal arrimées. Et ça valse dans le décor, caméra super 8 attachée au bout d’une corde qui cède. Il faut fatiguer la musique pour lui faire exprimer tout son suc, ses fluides, son bol alimentaire. Le courant alternatif est produit à coups de mollets et de bicyclette, dans l’abri anti-aérien. Ça s’essouffle, et ça meurt tant bien que bien.

Dans tout cela, de la musique, de la poésie, c’est-à-dire des corps en mouvement dans l’espace, pour fabriquer, se fabriquer, se déterminer face au chaos stupide du monde.




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